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Le Souk de Moustafette
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28 novembre 2010

De ver en vers

5196iEnfant déracinée, adoptée, incestuée, endeuillée, bref, plutôt malmenée par la vie, l'auteur a su se réconcilier avec sa part d'ombre grâce à l'écriture et plus particulièrement à la poésie. Ses textes narrent son vécu et son parcours.

Je dis "textes" car je n'arrive pas à coller le terme de poésie à ce recueil. Je m'attendais à des cris de révolte, à des flots d'agressivité, à des emportements violents. Non, il s'agit d'un constat froid et concis des ravages, parfois discrets mais toujours tenaces, que sème la maltraitance, des flashs de la vie quotidienne, avec ses peurs, ses peines, ses colères et ses angoisses. Beaucoup de pudeur, de retenue, mais des mots justes qui ne s'embarrassent pas de détails sordides pour faire mouche.

Extrait de "La grasse matinée"

Un dimanche matin
Dans son lit en rotin
Grasse matinée
Avec petit déjeuner

Quand soudain
Il a glissé sa main
Il a caressé ses seins
Doucement, a dessein

Sous le regard
De grand-mère
Qui n'a rien deviné
A un pas, le dos tourné

 

J'ai eu envie de partager ce recueil avec quelques une des ados cabossées dont je m'occupe. Je peux vous dire que ça a résonné à fond, mais toutes ont eu parfois le même ressenti. Je cite celui d' E...., 17 ans, maltraitée par un père alcoolique, à propos du poème Je hais les pères !.  E... s'est écrié : "Elle est gentille la dame, elle dit ça d'un air tranquille, moi je leur cracherais plus de saloperies !". Et moi bien sûr, qui n'attendais que ça, de saisir la balle au bond : Allez hop, E... écris donc quelques lignes envenimées pour notre prochain rendez-vous !

C'est vrai qu'on sent une forme d'apaisement dans le style d'Emilie Fédou. Apaisement qui cède à la rage et à la douleur quand on peut enfin dénoncer, accepter d'être aidé et apprendre à transformer en force ce qui aurait pu détruire.  C'est encourageant pour ces ados même si  pour certaines le chemin qui les y mènera est encore bien long.

Mes remerciements tout professionnels donc à l'auteur et à Blog O Book pour ce partenariat de lectures.

Nue comme un ver(s)     Emilie Fédou     Editions Publibook

 

logobob01

  

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17 novembre 2010

In nomine chocolate... amen (Challenge Chocolat 4)

9782253125556

Comme tous les ans, dans un bourg alsacien du Haut-Koenigsbourg, Les Vénérables sont réunis afin de décerner "La Cabosse d'Or", la plus recherchée des distinctions en matière de fabrication de chocolat.
Parmi les participants, Soeur Clothilde de l'Abbaye de Saint-Julien du Vaste Monde. Cette année, c'est elle qui repartira avec le chèque de 5 000 €. Et forcément, ça va faire des envieux...
D'où vient la fameuse recette des Soeurs et surtout quelles fèves de cacao utilisent-elles ?

"Tout ce qu'elle put dire, pour ne pas trahir leur secret, fut qu'elles obéissaient au voeu d'une des anciennes religieuses de l'Abbaye. Une étrangère, dont la famille avait développé la culture des cacaoyers au siècle dernier et qui avait accepté que la jeune femme prononce ses voeux et reste en France, à condition qu'elle puisse régulièrement venir les voir. La proposition d'une dot de fèves de cacao à l'Abbaye avait d'abord été un prétexte. Mais quand la religieuse avait rendu son âme à Dieu, la fabrication du chocolat était déjà devenue une réalité, un plaisir et une fierté. C'était aussi, aujourd'hui, ce qui faisait vivre la communauté."

Voilà pour la version officielle.

L'Abbaye a donc connu des jours meilleurs. Mais les bâtiments tombent en ruine, le nombre des moniales ne cesse de décroître, l'industrialisation a eu raison de la petite production et la chocolaterie est aujourd'hui en piteux état.  Il était donc inenvisageable de se rendre en Colombie pour les enchères annuelles des fèves de cacao afin de poursuivre la confection des délicieuses tablettes de chocolat dont seule l'Abbaye a le secret. Les 5 000 € tombent alors à point.
Pendant que nous faisons connaissance avec les membres de la communauté, Soeur Anne et Soeur Justine, une novice débrouillarde, se préparent pour leur périple. Béret de tricot, tailleur couleur boue, jupe sac et bottillons de cuir, allez hop elles s'embarquent pour Bogota... avec pas mal de monde à leurs trousses.

Des personnages sympathiques dans des aventures des plus cocasses au pays de tous les dangers... C'est La Grande Vadrouille version Cacao Connection mâtinée de Viva Maria...

"Mais dites-vous aussi que le baptême ne prend pas comme un vaccin... Pensez-y."

Un livre qu'on referme le sourire aux lèvres. Une tablette de bonne humeur pour se sortir du quotidien.

Soeurs Chocolat    Catherine Velle   Editions Le Livre de Poche

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10 novembre 2010

Je chante donc je suis

9782847201741Le début de ce livre c'est Perfect Life. Belle maison, grand jardin, une femme aux qualités multiples, un mari pilote de ligne qui ressemble à Paul Newman, quatre enfants irréprochables, même le chien s'appelle Beau... bref tout va pour le mieux pour Clothilde sous le soleil de la Bourgogne. Elle a même la chance d'avoir une amie qui lui procure un boulot alors que pointe l'angoisse des journées vides maintenant que les petits derniers sont aussi scolarisés, elle rafle une affaire immobilière au vu et au su de tout le monde, trouve des artisans disponibles en un rien de temps et lorsqu'elle a besoin d'une consultation chez un spécialiste, c'est dans la semaine qu'on lui en propose un. De quoi se plaint-elle, hein ?.. Oui mais voilà, suite à un terrible stress, Clothilde perd soudainement sa voix.

Tout ça commençait à me lasser et je regrettais déjà d'avoir cédé aveuglement à l'achat du nouveau livre d'Anne Delaflotte Mehdevi. J'avais tellement aimé "La relieuse du gué" et son ambiance intimiste que je n'imaginais pas un instant être déçue par ce second roman. Et je pensais comme la cousine bourguignonne "T'as bien des soucis de riches toi..."

Heureusement, alors que la mécanique familiale s'enraye pour mieux se recaler suite à cet événement, entrent en scène le chant et la musique. Et, contre toute attente, me voilà embarquée dans le parcours de cette femme à la recherche d'un désir profond d'exister.

A une analyse psychologique fouillée, l'auteur privilégie une approche de front. Point de grandes plongées dans le passé, l'auteur laissant, s'il le souhaite, le lecteur tirer lui-même les fils anciens qui ont pu se nouer au point de former cette grosse boule dans la gorge qui obstrue la parole et, au- delà, le désir. L'ici et maintenant sont sur le devant de la scène, avec en toile de fond une sensualité omniprésente.

"Cecilia Bartoli en était au titre 6, Caldo sangue de Scarlatti, Clothilde distinguait les paroles juste assez pour comprendre qu'il s'agissait de sang et d'adieux.

Chant : intonation particulière de même nature que la parole, à la différence que dans le chant, la voix s'élève.

Titre 9, Scarlatti, Qui resta... L'alta Roma.

Sur son radeau, Clothilde à la parole empêchée se préparait à explorer la voix en musique. Avant de se lancer, elle écoutait, dressée sur les accords du violon, cette Romaine qu'elle guettait et craignait comme un feu."

Au final, un texte sympathique, mais pas bouleversant, pour aborder l'histoire d'un tournant de vie et l'affirmation de soi.

Pour vos yeux, l'avis d'Aifelle ainsi que d'autres liens. Et pour vos oreilles et bercer votre lecture, le magnifique Caldo sangue.

 

Cecilia Bartoli, Scarlatti, "Caldo sangue"

 

 

Fugue     Anne  Delaflotte  Mehdevi     Editions  Gaïa

 

chanteurs010

31 octobre 2010

Finalement, la retraite... bof !

9782070787739Bienvenue au Trou, charmante bourgade d'un Sud enchanteur, ciel toujours bleu 365 jours par an, royaume médical de la famille Fenouil, père et fils spécialistes en tous genres, Le Trou, sa clinique, son crématorium flambant neuf, ses cimetières, moyenne d'âge des habitants 70-80 ans.

C'est là que Nicole, une jeunette de 60 ans, a choisi de prendre sa retraite après trente ans passés au PTT de Moisy dans le Nord.  Trente ans à économiser pour un petit appart de rêve dans une chouette résidence et sous le soleil permanent  "ça se refuse pas" avait dit l'agence immobilière.

"Nicole aime le beau temps. Elle trouve que même les cons quand le soleil brille c'est plus facile à supporter."

Depuis trois mois qu'elle y est, Nicole découvre la population.

"Là, installées sur des bancs, des cohortes d'antiques, des brochettes de permanentes bleues, des colonies d'yeux aveugles et de cannes blanches. Un soleil froid illuminait la scène. Elle n'avait jamais vu ça. Des dizaines et des dizaines de créatures décrépites en plein conciliabule. Telles des mouches dans l'étable qui bourdonnent autour des pots remplis de lait, telles étaient-elles toutes en train de parler de leur tension, de leur coeur, de leur cataracte, des soins qui n'étaient jamais assez bien faits, des médecins qui n'étaient jamais assez attentifs, de tout cela qui, avant, ne se produisait pas, parce qu'avant, bien sûr, avant était l'âge merveilleux de leur jeunesse d'or."

Des femmes, beaucoup de femmes forcément... Mme Cointe et Mme Rousse qui carburent au porto sur fond de télé braillante, Mme Daspet qui compte ses amants, Mme Chiffe qui prie à longueur de journée, Mme Rouby qui vit nuit et jour dans le noir par crainte des voleurs, Lucette persécutée par les nombreux téléphones que lui installe son fils, Mamoune qui fait tourner son fils en bourrique, et puis la femme de Gilbert, mort il y a cinq ans, qui s'évertue à conduire la 106 aux aurores au grand dam de sa fille, et encore Ginette, Maguy, Mauricette, Paulette Marguerite, etc etc...

Côté hommes c'est plus restreint, ces dames n'ont guère le choix... Il y a THE mâle, Pierre-Martin, le coq de la basse-cour, bon pied, dans ses Nike, bon oeil, pour reluquer encore, 90 ans au compteur, "tout auréolé de gloire dans son short bleu" lorsqu'il s'entraîne pour le marathon de Londres.
Le jeune Kévin, qui chôme pas au crématorium et a un certain goût pour les vieilles, enfin les plus girondes.
Et le père Catelan qui supporte plus grand chose, prêche contre la télévision, les 4 x 4 et se prend pour Zorro.

Un événement planétaire va surprendre tout ce petit monde et boulverser les journées meublées de cancaneries, de jalousies, de bondieuseries, de rendez-vous médicaux, de parties de scrabble, rythmées par les bulletins météo, les infos et les feuilletons mièvres. Tout cela sous l'oeil bienveillant de Notre cher Président.

"Notre Président, qui se bat sur tous les fronts pour aider le peuple français, a proposé une réduction du prix de vente des propthèses de cinquante centimes d'euro."

On l'aura deviné, notre avenir n'est pas rose. C'est drôle, grinçant, affolant, voire même désespérant, mais émouvant et tendre. On rit jaune car on ne peut pas s'empêcher de se demander : " Et moi, quelle vieille ou quel vieux je deviendrai ?", sachant qu'inexorablement on s'achemine un jour ou l'autre vers le club des t'as mal où et des qui qu'est mort ?...

Finalement, les caisses de retraite et de prévoyance devraient envoyer ce livre gracieusement à tous les travailleurs qui s'approchent, inconscients, dangeureusement du grand âge fatidique; ça nous éviterait de descendre dans les rue vitupérer contre Notre cher Président et sa politique du grand capital mafieux. Parce que franchement, vue sous l'angle de l'auteur, la retraite ça donne pas envie...

A compléter par le livre du regretté Pascal Garnier " Lune captive dans un oeil mort" (pas de billet pour cause de plein de choses). Voilà, après tout ça, reste toujours une solution, le suicide !...

Un ton sarcastique, des portraits plus vrais que nature, un livre cependant réjouissant où l'on retrouve toute l'originalité de Pascale Gautier que j'avais déjà découverte et appréciée ICI

Pascale Gautier     Les vieilles     Editions Joëlle Losfeld

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22 octobre 2010

Monologue d'une bibliothécaire

full_89Elle n'en peut plus cette bibliothécaire sur le retour, coincée dans son rayon géographie au sous-sol de sa bibliothèque de province, et où quasiment personne ne lui demande rien. Un matin, elle y trouve un homme enfermé là la veille au soir. Trop contente d'avoir quelqu'un sous la main pour l'écouter s'épancher sur les rancoeurs et ressentiments accumulés depuis des années.

Les vannes ouvertes, la logorrhée s'écoulera n'épargnant personne. Les auteurs, les lecteurs, les collègues, l'Histoire, la culture, l'amour, et elle aussi, avec sa névrose, sa solitude, ses révoltes et ses rêves...

64 pages pour un simple moment d'égarement, un délicieux "accès de fanfaisie".

" Moi aussi j'ai des angoisses. Cela ne se voit pas forcément, je sais me tenir, hein, mais j'en ai un paquet. La pire, c'est l'angoisse de la fantaisie. Elle m'assaille sans cesse. Il suffit que je vois un livre mal enfoncé dans une étagère, un peu de travers, un peu différent, un peu trop joli, un peu trop attirant, comme celui là-bas, pour que... J'ai peur qu'il tombe, j'ai peur qu'on le remarque trop, je ne parviens plus à me concentrer... ni à parler... avant d'avoir... Excusez-moi... Il faut que je le remette à sa juste place. Voilà. On ne le remarque plus. Il allait tomber, vous êtes d'accord ? Peut-être que j'exagère. Je suis un peu stressée par tous ces livres à ordonner, et en même temps ça me calme d'être ici."

 

La cote 400     Sophie Divry     Editions Les Allusifs

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31 mars 2009

Déjanté !

9782020945769A soixante-dix ans, Belalcazar, archéologue à la retraite, ne désespère pas de pouvoir un jour fouler du pied la mythique et aurifère cité inca de Païtiti.
Ayant déjà échoué par trois fois, il le sent, cette expédition sera la bonne.

Se baptisant "capitaine" pour l'occasion, le voilà sur un port britannique avant le grand départ en train d'admirer La Catherine et son sympathique et curieux équipage: Negook et Hug-Gluq, deux frères indiens et chasseurs d'ours dans le nord de l'Alaska, et Fontaine, ancienne infirmière au Vietnam et spécialiste de l'amputation, embarquée ici au titre de cuisinière.
Une première escale le long des côtes africaines permettra aussi de récupérer Florence Malbosse, cartographe de son état, qui préfère l'expression gestuelle à la parole.

La traversée suit son cours, rencontrant des zones anticycloniques ou d'autres plus turbulantes, comme celle qui voit apparaître à bord Jean-Philippe, pirate homosexuel, qui prend en otage La Catherine, avant d'être enrolé, lui aussi, dans la folle épopée.
Evidemment on ne s'improvise pas capitaine, et voilà La Catherine qui s'échoue sur la banquise en lieu et place des côtes péruviennes. Qu'à cela ne tienne, Inyoudgito va les tirer de là grâce à sa mongolfière et, par la même occasion, s'adjoindre à la joyeuse bande en les menant jusqu'aux portes de la jungle sud-américaine.
Là, Sophie entre en scène à son tour, guide un peu spéciale, on s'en doute !

"Au cours du dîner, Sophie a raconté comment les explorateurs précédents sont morts juste avant de tomber sur Païtiti. Elle les escortait et puis plus rien. Tombés raides. Tous en même temps. Cause inconnue. J'emmène chaque année des dizaines de touristes comme vous, finit-elle, et personne n'en est encore jamais revenu."

La traversée de la jungle est épique. Nos aventuriers sont ralentis par un curieux colis. De plus, ils doivent faire face aux aléas du climat, à un tas de petites bêtes qui veulent à tout prix leur tenir compagnie et à des autochtones plus ou moins amicaux, Petit Pénis et Grand Echalas sont parmi des plus sympathiques.

Nos héros parviendront-ils à Païtiti ? Ne comptez pas sur moi pour vous le dire...
Je vous invite à le découvrir par vous-mêmes en vous plongeant URGEMMENT dans les pages délirantes de ce romam où l'auteur, tel un Jules Vernes du XXIe siècle, s'en donne à coeur joie. Il plante ses personnages dans des situations les plus invraisemblables d'où il les sort d'une pirouette toute romanesque, n'hésitant pas à les interpeller et les houspiller, et tout ça à un rythme d'enfer et dans un style enlevé !

"On remonte le fleuve et on trouve Païtiti. Youpi. Criez victoire si vous voulez, serrez-vous dans les bras, plongez sous les bulles du fleuve sans craindre les gardes en peau de croco, mais cinquante bons kilomètres attendent les jambes, c'est l'auteur qui vous le dit. (...) Maintenant, chers personnages, vous faites comme vous voulez, je ne voulais pas plomber l'ambiance, mais au moins les choses sont dites."

Je ne sais si l'auteur carbure à l'herbe de Petit Pénis, mais ce qui est sûr, c'est qu'il y a bien longtemps qu'un livre aussi jubilatoire ne m'était passé entre les mains. Cet homme a le don de nous faire décoller du réel et ça fait un bien fou...
Alors, bravo et merci monsieur Pluyette pour votre imaginaire déjanté, on sent que vous vous êtes bien amusé !

La traversée du Mozambique par temps calme   Patrice Pluyette   Editions Seuil

 

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25 mars 2009

Ricochet de Gallay (4)

9782742782123Un père qui boit, une mère qui trime, deux enfants, Marc et Simone qui se serrent les coudes tant bien que mal, telle est une des dernières familles vivant dans le village du Haut. Les autres, ils sont partis ou descendus au village du Bas. En Haut, coupés de tout dès que tombe la neige, ne restent que les vieux et les bêtes.
Le froid, les coups, la crasse et la vermine composent l'ordinaire. Le seul îlot de tendresse, c'est chez M'mé Coche que les enfants en trouve quelques miettes, sous forme de petit gestes ou de chiches gourmandises

Lorsque le ventre de la mère s'arrondit pour la troisième fois, le père embauche une jeunette du village du Bas, Mado, qu'il ne tarde pas à engrosser aussi. Elle prendra vite la poudre d'escampette, non sans dérober les maigres économies du couple mais laissant en échange nuitamment sur le pas de la porte le fruit des amours adultères, Manue.
Résignés, tous acceptent cette bouche de plus à nourrir. Marc plus que quiconque. Un amour fou et protecteur va croitre au fils des années et l'entraîner au-delà du sordide quotidien.

 

L'office des vivants    Claudie  Gallay     Editions Actes Sud  Babel

20 mars 2009

Amour, magie et chocolat (Challenge Chocolat 2)

9782917559024Si vous avez aimé "Chocolat"*, vous dégusterez sans doute avec gourmandise la suite des aventures de Vianne Rocher et de sa fille Anouk quittées à Lansquenet où Vianne, en plein Carême, avait semé un plaisant vent de panique en ouvrant une confiserie, "La Céleste Praline", et en créant le premier festival du chocolat, et ce au grand désespoir du curé Reynaud qui perpétuait comme il se doit la célèbre doctrine catholique : pourquoi se faire plaisir alors qu'on peut souffrir...
A Lansquenet, Vianne avait aussi rencontré l'amour en la personne de Roux.
Mais un vent mauvais souffla, et Vianne dut fuir à nouveau.
Fin du premier épisode.

Quatre ans ont passé. La naissance de Rosette transforme le duo en trio, et de rafale en rafale le vent  pousse Vianne et ses filles jusqu'à Paris. Plus exactement sur la Butte Montmartre où la vieille propriétaire d'un minuscule café cherche quelqu'un pour l'aider et finalement lui succéder. Vianne est embauchée et transforme peu à peu l'estaminet en... chocolaterie.
Vianne ayant renoncé à ses pouvoirs secrets, le commerce est lent à démarrer..

"Nous n'avons pas de licence pour la vente d'alcool mais l'exquise odeur du chocolat chaud, des pâtisseries fraîches, des biscuits et des macarons, sans parler, bien sûr, de l'arôme enivrant des truffes amères, des chocolats à la liqueur, à la fraise, à l'abricot ou aux noix sont des invitations auxquelles il est bien difficile de résister."

Jusqu'au jour où l'exubérante et troublante Zozie de l'Alba pousse la porte de la chocolaterie bien décidée à la faire prospérer.
Et cette Zozie, croyez-moi, elle sait y faire pour embobiner son monde. Peu à peu "Le Rocher de Montmartre" ne désemplit plus, Zozie au comptoir et Vianne aux fourneaux.

Zozie n'emberlificote pas que les clients, même les plus revêches. Anouk aussi est séduite par la truculence du personnage, sa beauté, ses tenues extravagantes et sa bonne humeur.
Effectivement, alors que Vianne semble se dessécher dans la chaleur de sa cuisine, Anouk s'engouffre avec bonheur dans l'amitié que lui offre Zozie. Mystérieuse complicité d'ailleurs puisque peu à peu, au gré de petits événements, Anouk ne tarde pas à découvrir que Zozie possède elle aussi le don, des dons hérités de son Mexique natal et qu'elle utilise sans aucune mauvaise conscience... mais chut... car Vianne ne veut plus qu'on évoque cet aspect des choses.

Eternelle lutte entre le Bien et le Mal, richesse de la mythologie mexicaine, galerie de personnages attachants, avec en prime le pittoresque village de Montmarte, le tout saupoudré d'un brin de mystère et d'une très grosse pincée de magie, voilà une recette vite fait bien fait mais qui fonctionne presqu'autant que dans "Chocolat".
Et l'auteur est toujours en verve côté sensualité, tout n'est que parfums, saveurs, couleurs. Laissez-vous tenter, c'est garanti zéro calorie !

"En fondant, le chocolat devient luisant, la vapeur s'élève de la casserole de cuivre. Le parfum s'enrichit de cannelle, de poivre de Jamaïque et de muscade. Il développe de sombres harmonies d'anis et de café et des notes plus lumineuses de vanille et de gingembre. Tout est presque fondu à présent. Une vapeur légère monte de la casserole. Ce que nous avons ici, maintenant, est le Theobroma à l'état pur, l'élixir des dieux sous sa forme volatile. Et, dans cette vapeur, je peux presque apercevoir..."

Mis a posteriori dans le Challenge Chocolat !

*Chocolat Editions  J'ai lu
Le Rocher de Montmartre   Joanne Harris   Editions Baker Street

 

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28 septembre 2008

Une belle action

97822661727072006, deux couples, accompagnés de leurs enfants, se croisent dans un grand magasin d'usine du Nord de la France.
Chassés-croisés de regards entre eux. Ceux qui se reconnaissent et ceux qui s'ignorent encore.

"Ils sont beaux.
Je les ai trouvés beaux.
Je me suis trouvé beau, moi aussi, en train de les observer.
Si nous avons réussi à survivre, alors, la vie miroite et lance des éclats dorés."

Un des pères, Fred, reçoit comme un uppercut en plein plexus. Flash back, 1985, Fred est pion dans un collège, Myriam y est prof de dessin et vit avec Thomas, un jeune cadre dynamique aux dents longues, dont elle attend un enfant.
Jeux de séduction, éviction, persistance de l'attirance, distance... Le temps passe, un enfant naît, un drame survient.
C'est vers Fred que se tournent alors Myriam et Thomas. Fred qui répond présent. Et la valse des sentiments reprend, sournoise, teintée du plus profond désespoir et de la plus belle espérance, comme seuls le désir et ses ambiguités savent les révéler.

Ce roman m'a chamboulée. Il m'a propulsée dans mes années 80 à moi. Celles de tous les possibles, quand à vingt ans on tourne le dos à sa famille en se disant que les amis, eux, seront toujours là. Il a fait frémir des strates d'émotions que je m'efforce de tasser quotidiennement au fond de ma mémoire. Il a ravivé le manque, l'absence de ceux qui m'ont lâché la main au milieu de la rivière, me laissant seule poursuivre la route avec, sur les épaules, le poids des souvenirs que je ne sais plus avec qui partager.

"Ce sentiment étrange de l'identité.
Et puis celui de l'altérité, reçu de plein fouet."


Une troublante et bouleversante histoire d'amour et d'amitié comme j'aimerais que toutes elles se terminent, tournées vers la vie.

L'émotion d'une autre lectrice ICI

Passage du gué    Jean-Philippe Blondel    Editions Pocket

 

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26 septembre 2008

Végétariens, s'abstenir !

9782876734876Fin des années 50, dans une bourgade du Sud-Ouest, les Croquard règne sur un petit paradis de boustifaille et cochonnaille diverses et variées; spécialité, les pieds de cochon.

"Toque blanche, casaque bleu ciel, gilet bleu ardoise, parfois, Croquart était plus rond que gros, de fait presque aussi large que haut. Plus précisément rond et carré à la fois, une quadrature du cercle."

Pendant que Monsieur orchestre, découpant, soupesant, conseillant ses clientes, toutes en admiration devant le ballet excécuté par le maître-boucher, entre grâce et dextérité, arabesques des grands coutelas et doux chuintements du papier d'emballage, Madame, née Paupier, dans ses blouses fantaisie, cheveux et ongles impeccables, trône comme il se doit derrière la caisse tout en consultant des catalogues de vente par correspondance. Au gré des saisons, elle s'exerce à l'art en décorant la vitrine et, en cachette, elle s'essaie même à la littérature à ses moments perdus sous l'oeil énamouré de son faux caniche nain. "Divinité Civa Ardhanari, sur tabouret, de la caisse et du hors d'oeuvre cuisiné, elle était comme affligée par instants, indéchiffrables pour la plupart, d'une sorte de gêne mêlée d'inquiétude."
A l'arrière et en coulisses officient un timide commis boucher et un laborantin "[qui] semblait toujours préoccupé, avait l'air taciturne et fatigué, affichait une peau d'alcoolique léger-gros fumeur en instance de divorce."

Les Croquart ont le loisir modeste. Quelques soirées entre amis autour des rings pour assister à des combats de catch, quelques virées à bord du break id 19, bref une petite vie tranquille et bien huilée.
Jusqu'au jour où deux événements vont venir gripper la machine.
D'abord la mort d'un vieil ami de Monsieur Croquart, le célèbre Merlin, "abatteur aux abattoirs" , qui ne se remettra jamais de la modernisation de son métier !
Puis dans la foulée, sans doute pour oublier sa peine, la décision de Monsieur Croquart d'étendre son activité aux marchés de la région, histoire d'investir et de s'enivrer du doux sentiment de liberté que lui procure la conduite de son fourgon réfrigéré dans les petits matins frisquets.

A partir de là, tout dérape. Et c'est le grand pétage de plomb, tant aux abattoirs que sur les marchés, et à la boutique... peut-être bien que ça va saigner aussi !
Grandeur et décadence de la maison Croquart... Un drôle de premier roman où les "morceaux" remplacent les chapitres, des personnages hauts en couleur, deux scènes d'anthologie, l'ambiance années 60 en filigrane et une chute surprenante.

Une vraie boucherie    Bernard Jannin    Editions Champ Vallon

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21 septembre 2008

La mémoire qui flanche

9782070787265On a toujours vingt ans quand on est amoureux... et ce n'est pas Mado qui dira le contraire.
Mado, la vieille demoiselle qui vit seule avec son canari dans un petit pavillon de banlieue. Mado, qui a pour seule occupation la photographie des détails au ras du sol. Mado, dont la seule amie, Nala, la cartomancienne aux cheveux de feu, s'en retourne dans son pays.
Nala veillait sur Mado, inventant des tas de combines pour que Mado puisse continuer son chemin malgré sa mémoire qui fout l'camp.
Nala partie, c'est à sa nièce Judile, qu'elle confie Mado.

Arrive en ville l'Indien, ainsi nommé car il ne connait pas le vertige. Son royaume ce sont les toits du haut desquels il se noie dans le ciel, tentant peut-être d'apercevoir par delà les horizons lointains le pays qu'il a laissé derrière lui depuis longtemps.
Lui, là-haut, elle, si bas, leurs regards se croiseront pourtant, faisant naître des futurs jusque là inespérés.
Espoirs d'une vie sans plus aucun départ, pour l'Indien. Rêves d'une première douceur amoureuse, pour Mado.
Mais du ciel à la terre, la focale est immense, ouvrant la porte à toutes les illusions. Illusions d'optique surtout, qui peuvent se révéler fatales.
Au milieu de tout ça, Judile se sent flouée, rejetée, renvoyée à ses tristes amours.

"Elle ne sait pas combien de temps elle fixe ce ciel dont l'image lui restera toujours en mémoire. Chaque fois qu'elle a l'impression de basculer, elle songe au regard de l'homme et s'y retient comme à un fil, et ce fil est sans fin et l'emmène aussi loin qu'elle le veut. A quoi cet inconnu peut-il penser en observant le ciel avec une telle attention, se demande-t-elle; puis brusquement elle se rappellle son propre regard posé la veille au soir sur la terre en friche du jardin, les éclats du mica, cette impression d'immensité inversée, elle se souvient des mots de Judile : C'est votre histoire mais à l'envers. Et, de fait, il y a quelque chose d'infiniment familier dans la façon dont il regarde le monde."

Avec toujours autant de délicatesse, l'auteur sait aborder les thèmes les plus difficiles, notamment ici, la fuite de la mémoire et l'exil.
Une poésie tout en nuance, teintée de larmes et d'émotions, dans laquelle se diluent les souffrances et les différences. Un joli terreau d'où jaillit une fragile passerelle qui tente de relier les êtres et qui s'essaie à modifier la carte du tendre. Un imaginaire entre enfance et fin de vie sur le fil duquel se balancent tous les regrets et tous les possibles.
Un magnifique roman d'amour qui s'enroule sur les spirales des âges comme un éternel recommencement.

L'avis de  SYLIRE

Je voudrais tant que tu te souviennes   Dominique Mainard   Editions Joëlle Losfeld

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11 septembre 2008

Evidemment

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Je continue à être débordée...
Mais au moins sur la plage
on a le temps de lire !

Alors vite fait, un petit aperçu des lectures qui m'ont accompagnée pendant ces mois d'été :

9782742775477Un peu fadasse ce polar suédois qui surfe sur le succès de Millénium. Ne croyez pas votre libraire qui vous dit que si vous avez adoré la trilogie de Larsson, vous aimerez forcément celui-ci. Il n'a sûrement lu ni les uns ni l' autre.
Les tergiversations de l'héroïne sur ses régimes Weight Watchers, ses slips gainants et autres tenues amincissantes, ses amours d'un classicisme sans nom, voilà tout ce qui me reste au bout d'un mois.
Ah Lisbeth, où es-tu ? Reviens donc mettre une touche de trash dans la vie d'Erica Falck !!!

La princesse des glaces  Camilla Läckberg  Editions Actes Sud Noirs

9782843043895Déçue aussi par ce jardin de l'amour. Pourtant beaucoup de bonnes critiques. C'est vrai que la construction est originale. C'est le genre de bouquin qu'il faut lire d'une traite si on veut en apprécier tout le charme et se laisser happer par l'atmosphère plutôt délétère du récit.
Roman à tiroirs, personnages tourmentés, hésitant entre emprise, perversion et dépression, on risque parfois de se perdre avec eux dans ce récit labyrinthique.
Je l'ai lu en pointillé, ceci explique sans doute cela !

Garden of love  Marcus Malte  Editions Zulma

 

9782020977036

Si vous cherchez à assassiner votre amant en cinq leçons, ce livre est pour vous !
On y aime, on y souffre et on y mange.
L'amour et la nourriture ont toujours fait bon ménage.
Là encore, on évolue entre sensualité et perversité des sentiments.
Original mais pas bouleversant ce portrait de l'ogresse moderne.
L'imaginaire féminin a des ressources insoupçonnées. Attention, c'est parfois un peu cru !

A table !  Tiffany Tavernier  Editions Seuil

9782020679473

 

Vous devez savoir que cette folle de Brigitte Aubert, je l'adore. Ici, elle n'est pas dans le registre que je préfère, même si ce livre n'est pas dépourvu d'un certain humour.
Son imagination est toujours aussi débordante, mais cette fois plus sur un versant Indiana Jones. L'équipe de scientifiques, en perdition dans le Grand Désert Salé iranien, n'a pas fini d'halluciner. Y aurait-il une vie sous-terre ? Les Néandertaliens seraient-ils toujours parmi nous ? Ben oui, elle ose ! Et ça se lit d'une traite...

Le chant des sables  Brigitte Aubert  Editions Points Seuil

9782253122197Je suis un peu restée sur ma faim avec ce roman qui, sous prétexte d'une découverte macabre dans un petit village, explore la solidarité des habitants entre eux face à l'autorité et la presse, alors que cet événement les replonge dans un drame ancien. Quelques personnages attachants, une bonne description de la ruralité défendant les siens et ses secrets, mais une fin baclée.
Je l'ai lu un peu en pointillé, aussi je suis restée à distance de cette histoire. J'attends donc d'autres avis !

La maison Tudaure  Caroline Sers  Editions Le Livre de Poche

9782922868647Un charme suranné certain pour cette romance polonaise et l'histoire de cette jeune femme s'étioliant dans sa province entre une mère acariâtre et un éventuel prétendant plutôt ennuyeux.
L'arrivée d'un jeune poète séducteur venu faire lecture de ses oeuvres va pimenter son quotidien. Elle s'offre une parenthèse dont elle pense détenir la maîtrise...

Serial Lecteur a aussi succombé au charme de la vie provinciale des années 50 sur les bords de la Vistule.

Romance provinciale  Kornel Filipowicz  Editions Les Allusifs

9782864246121Autre jolie surprise, et autre histoire de province, en Argentine cette fois, pour ce huis-clos aux relents dictatoriaux.
L'absurdité du pouvoir totalitaire y est peinte de manière intelligente. Les portraits de ces habitants perdus au milieu de nulle part ont quelque chose de touchant dans leur abord du push militaire.
Pas de pathos mais une analyse tout en finesse du glissement progressif dans la dictature.
Ambiance plombante renforcée par la chaleur écrasante qui sait si bien laisser le temps et les hommes en suspension.
KATHEL a aimé et beaucoup d'autres aussi.

L'autobus  Eugenia Almeida  Editions Métailié

9782264044938

J'ai craqué pour ce pastiche de série télé que je n'aurais sûrement pas regardée sur un petit écran...
J'y retrouve mon auteur chouchou des années 80 qui passe là à la vitesse supérieure. C'est rapide, toujours un peu sex and drug and rock and roll et j'adore ça !
Et ça tombe bien, y'a toute une ribambelle de tomes.
J'attaque bientôt la saison 2 !

Doggy bag  Philippe Djian  Editions 10/18

9782742774449Quand l'auteure du Canapé rouge s'essaie au roman noir.
L'histoire d'un engrenage qui commence par une simple rencontre dans un train et qui se termine mal, très mal. Portrait d'une certaine ruralité, et un amour évident de la romancière pour ses personnages, âmes égarées et fragiles dans le flot de l'humanité.
Côté intrigue, c'est pas inoubliable mais cette facette de l'oeuvre de l'auteure n'est pas inintéressante.

Une simple chute  Michèle Lesbre  Editions Babel Noir

sgEt le dernier mais pas le moindre.
Encore un coup de coeur pour Sylvie Germain qui n'en finit pas de me séduire. Du bout de sa plume, cette femme dessine vraiment comme personne des mots et des images. On ne sait plus s'il s'agit d'écriture ou de peinture !
Tout au long de l'histoire de cette enfant prise dans les tourments des adultes et les affres familiales, on oscille entre bien et mal, entre ombre et lumière.
Récit d'une enfance, d'un secret et de la solitude dans laquelle il enferme. Du très grand art...

"C'est l'heure où la beauté du monde frôle les paupières et les lèvres des dormeurs au fond des chambres fraîches, et sème dans leurs coeurs de menues graines de désir. C'est l'heure où se délient les rêves, s'allège le sommeil ; où s'esquissent les songes."

L'enfant Méduse  Sylvie Germain  Editions Folio

 

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9 septembre 2008

A la recherche...

9782848761121du doux temps perdu de l'enfance.
L'histoire de cette famille de cafetiers du Nord nous ramène vers ce tendre paradis.

"Chez nous", le café familial, est le centre d'un petit monde où tout n'est que douceur et générosité.
Même les joies et les chagrins y sont tout enveloppés de pudeur, comme pour ne pas écraser l'autre de son bonheur ou l'éclabousser de ses peines.

On y parle de fleurs, de courses dans la campagne, d'amours adolescentes auxquelles se mêle l'amour de la lecture sous l'égide du grand Proust.
Et Marcel va faire se déplacer des montagnes lorsqu'un glas pourrait bien recouvrir de son son funeste le doux tintement de la petite cloche.

"(...). Est-ce que nous mêmes, nous comprenons tout ce que nous lisons ? Je n'en suis pas persuadée. Au fond, n'est-ce pas mieux comme cela ? Lire, c'est aller vers l'inconnu, c'est chercher à découvrir de nouveaux mondes, à percer de nouvelles énigmes... Sans garantie de succès. D'ailleurs, on ne fait jamais le tour d'un livre, on n'épuise jamais la totalité de son mystère. C'est même peut-être ce qui nous échappe qui est le plus important..."

(Bien sûr j'émets quelque réserve à cette citation, il y a vraiment des livres dont on a vite fait le tour et dont le mystère ne nous empêche pas de dormir ! Mais il est vrai que ceux qui nous touchent profondément n'en finissent jamais de nous séduire.)

Même si celui-ci ne sera pas ma "madeleine", j'avoue m'être laisée emporter par ce récit au ton un peu naïf, voire fleur bleue, qui réussit à habiller de légèreté les cycles de l'existence.
La nostalgie y revêt des habits aux couleurs de sucre d'orge; elle est fraîche comme un grand verre de limonade et sa simplicité n'a d'égal que ces souvenirs d'enfance gommés de tout ressentiment.
Un bel hymne à la vie, à l'amour filial et à l'altérité.

Rien d'étonnant qu'il ait tant plu à BELLESAHI !!!
Coup de coeur aussi pour  MIREILLE

La petite cloche au son grêle    Paul Vacca    Editions Philippe Rey

 

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20 août 2008

Tonton flingueur

9782253122326Road-movie très sympathique pour une fine équipe qui, à priori, n'aurait rien eu à faire ensemble.
Prenez un tueur à gages sur le retour, un naïf au grand coeur et sa mère la reine du Négrita, une paumée qui n'est pas trop regardante sur la direction que doit prendre sa vie et une vieille Belge à la libido bouillonnante.
Faites courir tout ce petit monde sur les routes du Sud, ajoutez-y d'inévitables imprévus ainsi que des soucis de santé, une larme de chance mêlée à quelques des gouttes de sang, et vous aurez un cocktail délicieux à consommer sans modération.

Comme on a déjà parlé énormément, et en bien, de ce livre, je me contenterai de vous citer de savoureuses petites phrases relevées deci-delà.

"Un ballon rouge vint rebondir auprès de lui. Un petit garçon et son père lui couraient après. Ils avaient l'air heureux, le ballon surtout."

"La ville n'avait rien vu, rien entendu. Les passants passaient, les chiens pissaient, les arbres poussaient."

"Il fut pris d'une panique étrange, comme s'il était mort et que personne ne l'avait prévenu."

C'est drôle et tendre à la fois; une écriture qui ne s'embarrasse pas de grands développements mais dont l'économie fait mouche à chaque fois.
Et comme l'auteur n'en est pas à son coup d'essai, je pense que ça sent la lecture en série, ça !

L'avis de PAPILLON qui vous mènera vers quelques autres.
Et KATHEL vient aussi de le lire.

Comment va la douleur ?    Pascal Garnier    Editions Le Livre de Poche

 

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5 août 2008

Quoi de neuf ?

9782266156721J'aime les maths maintenant !
Melle Oudin, ma si farfelue prof que je n'ai jamais pu oublier, en serait ravie...
Suffit juste de savoir comment aborder la matière. Quand c'est par la littérature, on peut tout me faire avaler.
La preuve, j'ai découvert toute seule que ce livre commençait à la page 9, se terminait à la page 152, bon 1+5+2= 8 d'acord, mais 9X8=72, et 7+2=9. Il y a 9 nouvelles dans ce recueil et j'ai mis exactement 1h30 pour les lire, soit 90 minutes, et 9+0=9 !!! Arf, j'y crois pas...
Bon, trève de plaisanterie. Même si ce petit bouquin n'est pas un précis de mathématiques, on y calcule beaucoup, et ce pour le plus grand plaisir du lecteur.

Tel cet homme qui ne veut pas rater la seconde à laquelle sa vie va basculer dans sa seconde moitié (39,6) Et je vous le donne en mille, 3+9+6=18, 1+8=9, aaaaaah c'est formidable ça marche encore !!!.
Ou cette ado néopunk-gothique au si joli prénom, Violaine, ( "Moi c'était Violaine. Pour "viol" et pour "haine". La vie est un viol, j'avais pas demandé à naître."), et qui rédige Le testament.
Ou encore cette épouse phobique du devoir conjugal qui met un point d'honneur à ne céder aux assauts de son tendre époux rien qu' Une fois par semaine, quand elle ne se perd pas en calculs et conjectures pour échapper à la chose. Ah, si les semaines avaient neuf jours ! ("Elle n'est pas du genre à feindre la migraine, ni même à l'avoir quand elle l'a. Le truc est si répandu dans la bouche des femmes qu'elle soupçonne le mot "migraine" de provoquer un effet aphrodisiaque sur les hommes.")

Ma Chère est un petit bijou. Ces messieurs réfractaires de la paternité y trouveront pléthore d'arguments pour convaincre leur maîtresse des bienfaits de l'IVG ! ("La pilule est un excellent contraceptif. Ajoutée à la capote anglaise et à un bon spermicide, je ne vois pas comment vous avez fait pour arriver à ce terrible résultat.")
Petite fille, lâche-moi s'adresse à toutes celles qui font toujours l'inverse de ce qu'elles avaient prévu, surtout lorsque face à elles se dresse le prince charmant...
Et qui n'a pas connu, comme dans L'envie , une de ces soirées où, même vêtue d'une simple serpillière, une bombe reste une bombe, et ce d'autant plus qu'elle est célibataire et abêtit tous les maris présents pendant que leurs épouses essaient vainement de faire bonne figure ? ("Je me souviendrais toujours de sa réponse quand je lui ai demandé le plus innocemment possible si Sonia avait un compagnon: plusieurs, elle m'arépondu en riant, elle donne dans l'homme marié, question de liberté.")

Je vous laisse la surprise de découvrir quel est ce Quelque chose de malsain dans l'air qui bousille un couple mais peut tout autant le réconcilier. C'te connerie la guerre fait rire aussi, enfin... presque jusqu'à la fin. C'est souvent lucide, un militaire...("Je suis descendu. Maintenant je sais que je n'aurais pas dû. J'auraismieux fait de m'occuper de mes trophées de guerre accrochés au mur du salon.")

L'auteure sait y faire pour dépeindre les petits arrangements que nous faisons tous plus ou moins avec nos angoisses, nos complexes et autres travers.
A lire sous le soleil. C'est drôle, pétillant, jubilatoire, rafraîchissant.
Et ça m'a coûté 4€95, soit 4+9+5=18 donc 1+8=9... Ahhhhhhh, re-j'y crois pas !!!!!

CATHULU  aussi a beaucoup aimé.

La preuve par neuf    Dorine Bertrand    Editions Pocket

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26 juillet 2008

Ricochet de Gallay...(3)

9782841569342Mais de Venise, je pris un billet pour les sables émouvants de La Hague.
Et de séduite, je deviens envoûtée par l'écriture lancinante de l'auteure...
Voilà près d'un mois que je couve ce billet.
Il y a des auteurs comme ça, qui laissent dans l'impossibilité d'écrire la moindre ligne tant l'émotion submerge, tant la pudeur fait craindre de se dévoiler plus qu'il ne faut.
Il y a des livres comme ça, dans lesquels on s'enveloppe, on se vautre. Des livres qu'on croit écrits pour soi, qui vous renvoient vers des temps douloureux. Des livres dont les pages brûlent les doigts tant on sait que les tourner mènera à la réminiscence, à la frontière de l'absence avec la tentation vertigineuse du vide. Des livres qu'on lit les larmes au bord des cils. Des livres où la lenteur devient un art de vivre à défaut de mourir et où le temps s'écoule au rythme nécessaire des renaissances.

Autour de La Griffue, maison posée sur une pointe de terre au-dessus de la mer, gravitent des personnages poussés là par les vents du hasard ou les souffles de la mémoire.

"Les histoires se ressemblent.
Il y a toujours d'autres histoires. Il suffit d'un rien, parfois, un angélus qui sonne, des êtres se rencontrent, ils sont là, au même endroit.
Eux qui n'auraient pas dû se croiser. Qui auraient pu se croiser et ne pas se voir.
Se croiser et ne rien se dire.
Ils sont là."


Les exilés. La narratrice, une ornithologue comptant, dessinant les oiseaux, et parsemant la lande de son chagrin; Raphaël, jeune sculpteur des mains duquel naissent des oeuvres tourmentées telles Les Suppliantes, La Mendiante, La Couturière de la mort; Morgane, sa jeune soeur pétillante malgré la vie qui s'effrite; Lambert, revenu sur les traces de l'enfance, et à la recherche de la vérité sur sa famille disparue en mer.

Et ceux d'ici, ceux qui sont nés les deux pieds dans la vase et la tête chamboulée par les rafales des vents violents et leurs tragédies. Théo, l'ancien gardien du phare amoureux des oiseaux et entouré de chats, qui expie quelque faute dans la solitude de sa bicoque; la Mère, sa femme, qui s'accroche à son amour perdu comme à son déambulateur et aux maigres restes de sa vie contenus dans un petit sac à main; Nan, la rivale, porteuse du mauvais oeil et brodeuse de linceuls, celle qu'on dit à moitié folle quand elle erre sur les côtes les jours de tempêtes en hurlant le nom des disparus; et enfin Lili, la fille, qui accueille en son bar la misère de tous ces écorchés pour mieux camoufler la sienne.

Enfin il y a les poètes, les funambules qui traversent tout cela le rêve aux lèvres. Max, épris des mots et de Morgane, un simple d'esprit qui, quand il n'oeuvre pas au cimetière, retape La Marie Salope afin de partir un jour pêcher son premier requin taupe; la Cigogne, l'enfant sauvageonne au bec de lièvre, qui observe les adultes à travers l'oeil grossissant d'une bille de verre; monsieur Anselme, vieux dandy qui ressasse à loisir les souvenirs qui le lient à l'arbre de Prévert, à la maison de Prévert, à la famille de Prévert...
Oui, car il y a aussi Prévert, le vrai, celui qui vécut là et aima ce petit bout de terre malmené. Prévert tel une bouffée d'oxygène ou un lancer de confettis, pour maquiller la rouille et les idées noires.

"La maison de Prévert était là, au milieu des arbres, une maison entourée par un jardin. On s'est appuyés à la barrière. La végétation était luxuriante, les rosiers, les tournesols en fleur, des plantes aux feuilles géantes et aux noms impossibles à prononcer. Un petit ruisseau traversait le jardin et passait sous le petit pont devant l'entrée."

Un livre somptueux et des personnages débordants d'humanité, le tout porté par une écriture dépouillée mais poisseuse de sel et d'eau mêlés, croquant la fragilité des côtes et des êtres d'où suintent l'absence, le manque, le deuil, la mort.
Grâce aux poètes, et au détour d'un rayon de soleil, émergent de la tourmente des percées de ciel bleu qui révèlent ce que la terre et les désespérés ont aussi de meilleur tapi sous leurs souffrances.
Est-ce justement parce que ce bout de monde est si inhospitalier aux hommes qu'il attire tant de naufragés de la vie venus s'échouer là comme pour mieux épuiser leurs peines ?
A moins qu'en fin de compte, ils viennent y retrouver l'inspiration de vivre...

Une lecture éprouvante mais envoûtante.
Plus de cinq cents pages où j'ai souvent cru me perdre tant ce texte génère une sorte d'îvresse des profondeurs. Le livre refermé, je me suis retrouvée échouée et suffocante comme après un dernier réflexe de survie, celui qui vous donne la force de remonter à la surface aspirer une énorme goulée d'air, de reprendre souffle, et alors...

"Je me suis assise jusqu'à ce que l'espace m'avale. Fasse de moi un être minéral en contemplation devant le monde."

Un très bel extrait et des avis chez  CATHULU.

Les déferlantes    Claudie Gallay    Editions du Rouergue

 

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23 juillet 2008

Ricochet de Gallay...(2)

9782742755738Après avoir été séduite par les frôlures littéraires de l'auteure ICI , je me suis embarquée pour Venise avec la narratrice de ce roman qui date de 2004.

En plein hiver, une femme esseulée s'en vient cicatricer ses plaies au baume vénitien.
Elle trouve refuge dans l'ancien palais Bragadin transformé en pension.
Sous l'égide du sympathique Luigi et dans un décorum un peu décrépit, vont cohabiter Vladimir Pofkovitchine, un vieux prince russe en exil, ainsi que Carla et Valentino, un jeune couple amoureux de danseurs italiens et elle, la femme brisée, qui en dernier recours est venue s'échouer parmi les ors, les effluves et les soupirs de la cité lacustre.

Sans amour Venise ne serait pas fidèle à elle-même, alors forcément des pas de hasard mèneront des êtres à se rencontrer. Tiens, et pourquoi pas au détour d'une petite librairie, hein, je vous le demande ! Des livres, des chats, des flocons de neige et du chocolat chaud au café Florian... Allez flâner...

"Il est quatre heures et il fait déjà nuit.
Campo Bruno Crovatto. Un chat déboule d'une ruelle, un chat jaune, presque roux, il traverse le campo désert et va miauler devant une porte. La porte s'entrouvre et le chat entre.
Je m'approche de la fenêtre.
Une vieille grille en fer rouillé. Une lampe allumée. Des livres derrière, sur des étagères, empilés. C'est une boutique. Un pantin rouge pend, accroché par ses ficelles au battant intérieur de la fenêtre.
Derrière la fenêtre, il y a un bureau. Sur le bureau, des livres, des papiers, des cartons.
Maintenant, il y a le chat.
Et derrière le bureau, il y a vous.
C'est comme ça que je vous vois la première fois. En homme assis. En train de lire alors que dehors la bora souffle et menace de tout arracher.
La lumière de la lampe éclaire vos mains. Les livres sur la table. Elle éclaire tout le haut de votre corps penché.
C'est comme ça que je vous vois ce jour-là."

Telle une dentellière, Claudie Gallay fait naître par petites touches subtiles un réseau de sentiments fragiles, parfois ambivalents mais toujours authentiques. Des fils, des points, et aussi parfois des noeuds, qui relieront entre eux les différents personnages de ce théâtre baroque.
Mais Venise est aussi la ville des masques... Qui en porte ? qui le tombe ?

Avec simplicité et délicatesse, l'auteure sait nous parler d'amour sans jamais s'enliser dans la vase des clichés que l'on pourrait craindre de voir surgir au bout des gondoles. Mais non, elle nous parle d'art, d'histoire, de littérature, d'humanité, bref, de tout ce qui sauve l'être lorsqu'il aurait la tentation de se laisser aller à se morfondre sur le manque de l'autre.

"- Ici, l'été, c'est envahi de monde. Il ne faut pas venir.
- Où il faut aller l'été ? je demande.
- Nulle part. Il faut acheter des livres et rester chez soi. "

Je vais suivre le conseil !

Seule Venise    Claudie Gallay    Editions Actes Sud Babel

 

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1 juillet 2008

Résumons-nous

Comme j'abandonne définitivement l'espoir d'écrire un billet pour chaque livre lu en ce mois de flemmingite aigüe, voici donc un bref aperçu de mes récentes lectures.

J'ai beaucoup aimé

2848040173

Ce livre prêté par SYLIRE.
On jurerait qu'il est écrit par un psy qui voudrait se faire un peu pédagogue et romancer la psychologie adolescente; apparemment, il n'en n'est rien mais ça sent le vécu.
Une très bonne idée que celle de faire partager ainsi son expérience.
Je l'ai recommandé à mes collègues et le conseille aux ados que je vais voir en pédiatrie suite à certaines conduites à risques avec lesquelles ils flirtent, et dont les TS font partie mais que l'on évite de qualifier ainsi au grand dam de certains ados qui revendiquent haut et fort ce geste même pour quatre comprimés de Doliprane avalés.
Suicide est un mot tellement difficile à prononcer et à attendre... Pas plus que tous les autres qu'ils n'ont pas pu dire et qu'ils leur ont donné un jour la tentation de se taire à jamais.

ANNE l'a lu également et a été touchée.

TS   Fabrice Vigne   Editions L'Ampoule

9782020612036

Merci ANNE pour ce petit livre, je ne regrette pas qu'il ait fait une halte chez moi.
Une histoire ordinaire, celle de gens simples qui s'aiment et qui se quittent sous l'oeil de bonnes gens qui vivent leur vie un peu par procuration.
Une écriture sobre pour dire des choses banales mais uniques pour autant qu'elles se transforment en émotions et qu'elles gonflent les voiles qui nous font avancer dans la vie.

VAL, BELLESAHI en parlent avec tendresse.

 

 Le soir du chien   Marie-Hélène Lafon   Editions Points Seuil

 

J'ai aimé

9782842631499

Cette fable douce-amère à la sauce Bartelt.
On rit, mais un peu jaune quand même...
Une jolie disgression sur l'amour de son prochain et la bonne conscience !
Et un couple émouvant qui nous change des stéréotypes habituels.
Ne pas se fier aux apparences...
A méditer...

Merci VAL

 

 La Belle Maison   Franz Bartelt   Editions Le Dilettante

 

Lisbeth s'embourgeoise, Lisbeth se féminise, Lisbeth est plus forte que Robocop.9782742765010
Mais bon, c'est Lisbeth alors on lui pardonne ! Tant qu'elle reste un brin caractérielle et refuse toute collaboration avec les flics, elle sera toujours ma copine...
Pendant qu'on lit ça, on pense pas, c'est toujours ça de pris.
Mais vous pouvez aussi lire ces quelques mots de Denis Robert, c'est pas de la fiction mais la vraie vie et c'est bien envoyé (Millénium, c'est à la fin pour ceux que ça barbe, mais vous avez tort de ne pas tout lire).

 

Millénium Volume 2   Stieg Larsson   Editions Actes Sud Noirs

9782070412860

Un bon petit polar sans prétention.
Une sombre histoire de filiation chez des bourgeois de province bien propres sur eux et qui n'hésitent pas à employer les grands moyens pour le rester et sauver les apparences.
Une enquête rondement menée par une équipe de flics attachants et rendus humains grâce aux incursions dans leur vie privée.
En prime, une balade dans l'Antiquité et la mythologie, le tout sur fond de côte normande entre fruits de mer et vin blanc.

 

 Meurtres à l'antique   Yvonne Besson   Editions Folio Policier 

 

J'ai été déçue

9782070357420

 

 

 

Je n'ai pas trop accroché à cette histoire de librairie et d'esprits cogneurs.
Et j'ai attendu longuement qu'éclate "l'affaire Lolita"...
Pourtant certains personnages sont attachants et cette histoire pouvait faire gamberger toutes celles et ceux qui rêvent un jour d'ouvrir ces petits coins de paradis...
Reste cependant une balade sympathique outre Manche. Et une jolie couverture !

CATHULU est plus indulgente.

 L'affaire Lolita   Penelope Fitzgerald   Editions Folio 

 

J'ai abandonné

9782070356379

Celui-ci qui s'annonçait pourtant prometteur au regard de la 4ème de couv :
"Plaisir en bouche est l'équivalent, pour les arts de la table du Parfum de Suskind pour les odeurs. Un plaisir quatre étoiles."
J'aime pas les arts de la table, donc je me demande bien ce qui m'a pris de venir échouer dans ce polar, qui d'ailleurs à la page 103 n'en n'est toujours pas un. J'ai même eu un peu la nausée à cause de toute cette bouffe et ce personnage à qui tout réussi m'a vite lassée.
Et si on ajoute en plus de vagues élucubrations sur les tendances gastronomiques ou sur les modes d'un temps futur, ça m'ennuie prodigieusement.
De grâce, laissez à Suskind ce qui lui appartient...

Plaisir en bouche   Béatrice Joyaud   Editions Folio Policier

 

9782757803141Abandonné aussi celui-ci.
Pas réussi à me laisser toucher par l'histoire d'Aden Seliani, cet homme assailli de tous les côtés par les emmerdes ! Sa mère dans le coma, son épouse qui demande le divorce, un boulot qui se révèle autre que ce qu'il croyait, l'âge, etc etc...
Stop ! Moi aussi j'ai mes problèmes et je me coltine ceux des autres à longueur de journée, alors là non, je ne suis pas d'humeur.
En plus, c'est très urbain, et moi j'aime pas la ville, surtout quand je suis de mauvais poil...

 

 Aden   Anne-Marie Garat   Editions Points Seuil

 

Et j'ai picoré

9782070345458

 

Quelques gourmandises dans celui-ci.
"Nuages
Les nuages sont impensables. Incommensurables. On peut raisonnablement estimer qu'il ne s'en est pas trouvé deux pour être identiques depuis la formation de l'atmosphère terrestre. En ce sens, ils sont une parfaite image du monde.

Sac à dos
(...)Cependant, le sac à dos exprime son époque d'une autre façon: dans les rames et les couloirs du métro, dans la rue, ses usagers très régulièrement heurtent les autres, faute d'estimer la place qu'occupe cet appendice de leur personne. Bref, un nombre grandissant d'individus négligent de s'interroger sur leur encombrement."

(et que dire des valises à roulettes !!! là c'est moi qui fais la remarque)

Petit éloge de la douceur   Stéphane Audeguy   Editions Folio

 

 

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15 juin 2008

Frôlures

9782742773510"J'aurais voulu la toucher. La chose me paraissait impossible. J'ai avancé ma main et je l'ai posée à côté de la sienne. Tout près. Sur la table.
- La frôlure... elle a dit en regardant ma main, et je me suis demandé si ce mot que je n'avais jamais entendu existait vraiment ou si elle venait de l'inventer.
La frôlure. Ce moment ineffable.
Bientôt je ne la verrais plus. Je le savais. Parce que j'allais partir. Qu'elle allait mourir.
- J'ai aimé cela de vous, votre étonnante simplicité.
- Vous le dites au passé...
Oui, c'était cela, je parlais d'elle au passé. Je parlais d'elle, avec sa voix."

Pas gai tout ça, me direz-vous...
Mais Alice, la vieille femme qui invente de si jolis mots, est une ensorcelleuse. Et elle a jeté son dévolu sur le narrateur pour en faire le dépositaire d'une histoire. Elle aurait pu choisir de se taire à jamais comme sa soeur Clémence qui, elle, un soir de Noël lointain a décidé de se faire muette.
Non, Alice jette des mots comme d'autres lancent des sorts, elle raconte des histoires de voyages, la fuite de l'Europe en guerre et la longue traversée sur un vieux rafiot jusqu'à New-York, l'épopée au pays des Indiens Hopi, en Arizona où elle séjourna avec son père, photographe et amis des surréalistes réfugiés comme lui sur la côte Est.
Elle entraîne sur les pas de Breton venu là lui aussi, à la recherche de savoirs invisibles. Elle dit la vie, la mort d'un peuple décimé.

Au coin du feu dans sa maison de la côte normande, elle réveille les sages qui martellent de leurs pieds la poussière des mesas afin d'invoquer les hommes-nuages qui feront tomber la pluie. Avec parcimonie, elle exhume de ses armoires des trésors, carnets, photos, correspondance, objets sacrés aux faciès inquiétants.
Le narrateur, tour à tour appâté et rejeté, comme hypnotisé, se laisse prendre au piège et navigue à vue. Réalité ou fabulation ? Peu importe, le charme opère dans cet entre-deux.

"- Je ne viens plus là depuis longtemps.
Les murs étaient recouverts de livres. Un grand escabeau sur lequel il fallait monter pour atteindre ceux qui étaient tout en haut. Des tapis. Des tableaux contre les murs. Au milieu de la pièce, le bureau de son père. En face, une armoire. Elle a posé sa main sur la clé.
- Tout est là-dedans.
Elle a tourné la clé.
- Je ne sais pas pourquoi je vous montre tout ça. Sans doute je ne devrais pas...
J'ai cru qu'elle allait ajouter quelque chose mais elle n'a rien dit. Elle m'a tendu la lampe.
- Vous avez cinq minutes.
Elle est allée s'asseoir au bureau."


Dans l'autre vie, celle des vacances familiales et d'un certain laisser-aller, des maillots claquent sur le fil à linge, des vélos posés contre la barrière, des pelles et des seaux éparpillés sur la terrasse. Des enfants jouent et rient pendant qu'un couple prend l'eau et sombre à bas bruit.

Deux magnifiques rencontres.
Celle d'une vieille dame grincheuse et chafouine et d'un jeune mec un peu paumé dans les méandres de sa vie. Celle d'une auteure qui sait caresser son lecteur avec la douceur d'une plume et l'entraîner dans la simplicité des sentiments comme dans la violence des émotions les plus terribles.
Cette lecture a déposé des frissons sur ma peau; de ceux que l'on ressent à l'évocation des beaux souvenirs qui ne sont plus mais qui flottent, encore et toujours, autour de notre existence tels des électrons nous éloignant ou, au contraire,  nous attirant vers ceux des autres. Ainsi parfois, une étincelle suffit, ça produit des petites explosions. Alors se révèlent des réminiscences qui se fardent de pudeur avant d'éclore en magnifiques fleurs de mémoire.

"Il y a ce que nous comprenons, tout ce que nous sommes capables de transcrire en essayant d'être au plus près. Et puis il ya le reste. Tout le reste. Le monde des apparences, des silences. La vastitude de l'innommable.
Ce monde est intranscriptible. Il répond à une autre logique. Parfois même, il n'y a pas de logique.
Il faut décoder.
Le déplacement imperceptible. Sans doute est-ce là ce fameux pas de côté cher à André Breton. La juste mesure à prendre pour avoir une vision différente.
Un pas peut suffire."

Laissez-vous allez à ces douces frôlures.

Comme KATELL et quelques autres.

Dans l'or du temps    Claudie Gallay    Editions Actes Sud Babel

 

hopidt6

 

 

30 mai 2008

Du premier au dernier

9782070392841Publié en 1923, La steppe rouge est le premier ouvrage de Joseph Kessel; l'auteur a alors vingt-cinq ans.
Il s'agit d'un recueil de nouvelles ayant toutes pour cadre la Russie en ébullition, celle des Soviets  issue des révolutions de 17.
Aux quatre coins du pays règnent le chaos et la peur. Chacun tente de s'adapter, ceux qui ont tout perdu, comme ceux qui croient qu'ils ont tout à gagner.
Un petit professeur effacé se transforme en un redoutable commissaire du peuple. A Tachkent, la jeune fille instruite d'un noble déchu se laisse séduire par un vieil ami de la famille qui l'entraîne à Moscou, puis l'abandonne. Des mères sont impuissantes face à la Tchéka qui emprisonnent leurs fils. Les rouges envahissent Odessa, on y joue au fou pour sauver sa peau. A la frontière lettone, un homme rescapé des geôles raconte. Un soldat trouve du réconfort auprès d'une femme. Comment réagira-t-il lorsqu'il la retrouvera dans une cellule où elle attend d'être exécutée ?

9782070370726bPublié en 1975, Les temps sauvages est le dernier livre de l'auteur.
En Octobre 1918, au sortir de la guerre où il a combattu dans l'aviation française, Joseph Kessel s'engage comme volontaire pour une mission en Sibérie afin d'arrêter les Allemands entre l'Oural et la Volga. Il quitte Brest pour rejoindre New-York, traverse les Etats-Unis et s'embarque pour le Japon. Une dernière escale le conduit à Vladivostok où il rejoint d'autres volontaires venus de divers pays européens.
En attendant l'arrivée de leurs appareils, les hommes se retrouvent confrontés au grand chambardement de la Révolution d'Octobre et à l'anarchie la plus complète qui s'empare de la ville.
Entre les Cosaques vivant comme des princes dans des wagons du Transsibérien et les chaudes nuits à l'Aquarium, le cabaret où se retrouvent les occidentaux et où des femmes de l'ancienne Russie tentent de survivre de leurs charmes, le jeune Kessel plonge dans l'îvresse de la vie nocturne afin d'oublier la misère de cette cité mythique du bout du monde transformée en véritable cours des miracles.
Un épisode autobiographique romancé, mais surtout un témoignage unique et rare sur une époque troublée en cette contrée lointaine, un ultime livre écrit au seuil d'une vie bien remplie puisque J. Kessel décèdera quelques temps plus tard, en 1979.

Entre ces deux livres, une bibliographie impressionnante, romans, contes, reportages, témoignages, articles.
La vie même du grand Jeff est un roman à elle seule. Je vous conseille la magnifique autobiographie d'Yves Courrière "Joseph Kessel ou Sur la piste du lion" (éditions Plon).
Aviateur, journaliste, grand voyageur et baroudeur, écrivain, Kessel mêlera sa vie sur ces quatre registres et aux quatre coins du monde. Son âme slave lui donnera le goût extrême de la fête, le sens de l'amitié entre hommes et celui de la fidélité aussi bien en amitié qu'en amour.

Mon père avait une passion pour cet auteur qui croquait la vie à pleines dents, et dont les oeuvres occupaient plusieurs étagères de la bibliothèque familiale. 
Rien d'étonnant donc à ce qu'il ait bercé mon adolescence. Je lui dois l'envie de voyager. De tous ses livres, ma préférence va aux quatre volumes de "Le tour du malheur" et au célébrissime "Les cavaliers".
Un bien bel héritage littéraire...

La steppe rouge  Les temps sauvages    Joseph Kessel    Editions Folio

 

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