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Le Souk de Moustafette
Le Souk de Moustafette
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29 novembre 2010

La femme chocolat (Challenge Chocolat 5)

9782070418992Apolline, 170 cm pour 130 kg, a connu dès l'enfance les affres de l'embonpoint.
Elle grandit entre un père trop tôt disparu, une mère tyrannique, un poil perverse, et un jeune frère rebelle qui prendra bien vite la poudre d'escampette. Restée seule avec sa mère, elle passe l'agrégation de philo avec succès, traverse les années 70 et prend à son tour son envol. Elle quitte maman pour un petit pavillon en banlieue et devient prof dans un lycée.

A 47 ans, Apolline partage sa vie entre son boulot - elle est adorée par ses élèves -, sa passion pour le cinéma, Fellini bien sûr, un amant de passage et les visites hebdomadaires à sa mère qui continue perfidement à entretenir la gourmandise de sa fille sans oublier de la morigéner au passage.

"Donc Apolline reste, et dîne d'un énorme plat de tagliatelles au chocolat noir que sa mère a confectionné devant elle sur la paillasse de la cuisine, tout en poursuivant la conversation.
- Je n'arrive pas à les faire aussi bien que toi, dit Apolline, assise à la table et la tête appuyée sur une main, comme en contemplation.
- C'est pourtant tellement facile, ma pauvre fille : 500 grammes de farine, 5 oeufs, du sel, un peu d'eau, un peu de cannelle, 250 grammes de chocolat fondu, tu mélanges tout ça, tu laisses reposer une bonne heure, tu étales, tu découpes tes tagliatelles, tu les laisses sécher au moins une demi-heure, tu les plonges deux minutes dans l'eau bouillante et c'est prêt."

Une mystérieuse soirée, donnée en son honneur par un ami, va voir la vie d'Apolline prendre un nouvel élan.

Rhaaa.. le chocolat (qu'elle range dans sa pharmacie !) et ses vertus antidépressives et aphrodisiaques ! 

Emaillé de clins d'oeil cinématographiques, de petites réflexions philosophiques et de références aux idéologies des années traversées, nous suivons le parcours d'une femme peu ordinaire qui cache derrière sa bonhomie et ses rondeurs bien des secrets et des souffrances.

"Dès lors que vous assumez un physique hors du commun, ce qui me semble être votre cas, ce physique qui vous fait quitter le terrain de la banalité braque sur vous les yeux qui vous entourent, et parmi ces yeux il y en a forcément qui ne peuvent se détacher de vous. La beauté, la laideur, la grosseur, la maigreur, tout cela n'a aucune importance. La malédiction, c'est d'être banal, c'est de ne posséder rien qui fasse rêver quelqu'un d'autre."

 Je n'ai pas encore testé la recette des tagliatelles, si quelqu'un se lance qu'il en donne des nouvelles !

Le chocolat d'Apolline     Michel Cyprien     Editions Folio

 

femmechoc

 

 

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28 novembre 2010

De ver en vers

5196iEnfant déracinée, adoptée, incestuée, endeuillée, bref, plutôt malmenée par la vie, l'auteur a su se réconcilier avec sa part d'ombre grâce à l'écriture et plus particulièrement à la poésie. Ses textes narrent son vécu et son parcours.

Je dis "textes" car je n'arrive pas à coller le terme de poésie à ce recueil. Je m'attendais à des cris de révolte, à des flots d'agressivité, à des emportements violents. Non, il s'agit d'un constat froid et concis des ravages, parfois discrets mais toujours tenaces, que sème la maltraitance, des flashs de la vie quotidienne, avec ses peurs, ses peines, ses colères et ses angoisses. Beaucoup de pudeur, de retenue, mais des mots justes qui ne s'embarrassent pas de détails sordides pour faire mouche.

Extrait de "La grasse matinée"

Un dimanche matin
Dans son lit en rotin
Grasse matinée
Avec petit déjeuner

Quand soudain
Il a glissé sa main
Il a caressé ses seins
Doucement, a dessein

Sous le regard
De grand-mère
Qui n'a rien deviné
A un pas, le dos tourné

 

J'ai eu envie de partager ce recueil avec quelques une des ados cabossées dont je m'occupe. Je peux vous dire que ça a résonné à fond, mais toutes ont eu parfois le même ressenti. Je cite celui d' E...., 17 ans, maltraitée par un père alcoolique, à propos du poème Je hais les pères !.  E... s'est écrié : "Elle est gentille la dame, elle dit ça d'un air tranquille, moi je leur cracherais plus de saloperies !". Et moi bien sûr, qui n'attendais que ça, de saisir la balle au bond : Allez hop, E... écris donc quelques lignes envenimées pour notre prochain rendez-vous !

C'est vrai qu'on sent une forme d'apaisement dans le style d'Emilie Fédou. Apaisement qui cède à la rage et à la douleur quand on peut enfin dénoncer, accepter d'être aidé et apprendre à transformer en force ce qui aurait pu détruire.  C'est encourageant pour ces ados même si  pour certaines le chemin qui les y mènera est encore bien long.

Mes remerciements tout professionnels donc à l'auteur et à Blog O Book pour ce partenariat de lectures.

Nue comme un ver(s)     Emilie Fédou     Editions Publibook

 

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23 novembre 2010

Vu dans mon village

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Signez la pétition lancée par POLITIS, c'est  ICI

Même si la loi a été votée par Assemblée et Sénat, elle peut ne pas être appliquée.
Via l'article 11 de la Constitution
il y a moyen de contraindre notre petit président d'en passer par le référendum.
En effet, un référendum peut être proposé par 1/5 des parlementaires
eux-mêmes soutenus par 1/10 des électeurs (nous).
Alors faites circuler l'info et le lien !

signez_l_appel_pour_un_referendum_sur_les_retraites_690ab

17 novembre 2010

In nomine chocolate... amen (Challenge Chocolat 4)

9782253125556

Comme tous les ans, dans un bourg alsacien du Haut-Koenigsbourg, Les Vénérables sont réunis afin de décerner "La Cabosse d'Or", la plus recherchée des distinctions en matière de fabrication de chocolat.
Parmi les participants, Soeur Clothilde de l'Abbaye de Saint-Julien du Vaste Monde. Cette année, c'est elle qui repartira avec le chèque de 5 000 €. Et forcément, ça va faire des envieux...
D'où vient la fameuse recette des Soeurs et surtout quelles fèves de cacao utilisent-elles ?

"Tout ce qu'elle put dire, pour ne pas trahir leur secret, fut qu'elles obéissaient au voeu d'une des anciennes religieuses de l'Abbaye. Une étrangère, dont la famille avait développé la culture des cacaoyers au siècle dernier et qui avait accepté que la jeune femme prononce ses voeux et reste en France, à condition qu'elle puisse régulièrement venir les voir. La proposition d'une dot de fèves de cacao à l'Abbaye avait d'abord été un prétexte. Mais quand la religieuse avait rendu son âme à Dieu, la fabrication du chocolat était déjà devenue une réalité, un plaisir et une fierté. C'était aussi, aujourd'hui, ce qui faisait vivre la communauté."

Voilà pour la version officielle.

L'Abbaye a donc connu des jours meilleurs. Mais les bâtiments tombent en ruine, le nombre des moniales ne cesse de décroître, l'industrialisation a eu raison de la petite production et la chocolaterie est aujourd'hui en piteux état.  Il était donc inenvisageable de se rendre en Colombie pour les enchères annuelles des fèves de cacao afin de poursuivre la confection des délicieuses tablettes de chocolat dont seule l'Abbaye a le secret. Les 5 000 € tombent alors à point.
Pendant que nous faisons connaissance avec les membres de la communauté, Soeur Anne et Soeur Justine, une novice débrouillarde, se préparent pour leur périple. Béret de tricot, tailleur couleur boue, jupe sac et bottillons de cuir, allez hop elles s'embarquent pour Bogota... avec pas mal de monde à leurs trousses.

Des personnages sympathiques dans des aventures des plus cocasses au pays de tous les dangers... C'est La Grande Vadrouille version Cacao Connection mâtinée de Viva Maria...

"Mais dites-vous aussi que le baptême ne prend pas comme un vaccin... Pensez-y."

Un livre qu'on referme le sourire aux lèvres. Une tablette de bonne humeur pour se sortir du quotidien.

Soeurs Chocolat    Catherine Velle   Editions Le Livre de Poche

soeurs013

 

16 novembre 2010

Week-end prochain

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A l'honneur cette année
LA  BELGIQUE

J'ai jeté vite fait un oeil au programme, Jeanne Benameur, Jonathan Coe, Eric Fottorino, Sofi Oksanen (pour ceux qui me parlent le plus) sinon Anne Herbauts, Xavier Hanotte, Pieter Aspe, Stefan Brijs, David Van Reybrouck (pour la Belgique). Pfff... même pas la loufoque au chapeau noir qui mange des fruits pourris !

Plus d'infos  ICI

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14 novembre 2010

Chocolate Mundi (Challenge Chocolat 7)

9782246763918Adrian Troadec, contrairement à ce que ce patronyme laisserait supposer, est citoyen Helvète. Nous faisons sa connaissance en 1922, année de ses dix-huit ans, dans sa bonne ville de Lausanne. Profession, livreur de lait. Un jour, sa route croise celle d'Alma Trapolyi.

"Alma Trapolyi jouait du violoncelle dans le petit orchestre du lycée. On était en 1922, les fascistes marchaient sur Rome. Elle avait seize ans. Adrian Troadec remarqua qu'elle se distinguait de toutes les autres jeunes filles.
Pour lui, en tout cas, elle se distinguait de toutes les autres.
Mais, il lui fallut des années pour la connaître."

Ce sont toutes ces années que le roman relate en cent très courts chapitres.

Joueur d'échecs, Adrian Troadec élabore moult stratégies pour conquérir la belle avant de découvrir que le chocolat sera sa planche de salut. Mais de maladresses en rendez-vous manqués, la vie en décide autrement. L'année même où il ouvre sa première boutique, Le Petit Chocolat Troadec, Alma embarque pour l'Amérique.

"... il pensa qu'il pouvait encore lui arriver quelque chose de neuf qui remplirait sa vie de sens. Et par curiosité, seulement par curiosité, il décida de continuer à vivre."

Et sur l'échiquier du monde les petites histoires rencontrent alors la grande Histoire. De voyages en exils, d'airs de jazz en morceaux classiques, de morts en naissances, l'auteur tisse une toile dont Adrian Troadec et sa chocolaterie restent le centre.

"Le dimanche 17 Avril 1955, Alma Trapolyi et Adrian Troadec se marièrent et allèrent vivre dans leur nouvelle maison. Ils l'appelèrent "Les années perdues".
Le lendemain, Albert Einstein mourut à Princeton, aux Etats Unis, Marilyn Monroe achevait de tourner Sept ans de réflexion."

Une jolie déclinaison des thèmes universels, l'amour, la fuite du temps, la transmission, le hasard, sur fond des grands événements du XXe siècle. Un condensé des hommes et du monde mené avec maestria. Un conte à déguster comme on grignote un ballotin de chocolats !

 

Pour l'amour du chocolat    José Carlos Carmona    Editions Grasset

 

 

violoncelle1

 

 

13 novembre 2010

Défis et des faits

bedtimestoryEn lisant deci delà les défis dans lesquels se lancent nombre de blogueurs-blogueuses, j'ai toujours été admirative, voire envieuse, de ne pouvoir m'infliger la moindre contrainte, même en matière de lectures. Mais je crois avoir enfin trouvé le mien. Et vous allez apprécier comment Moustafette a l'art de faire fi des contraintes...

En fait, l'idée a commencé à me trotter dans la tête hier en achetant un livre. Oui, je sais, pour une lectrice compulsive, c'est d'une banalité affligeante. Cette idée aurait pu surgir devant les kilomètres de boîtes de chocolats qui encombrent déjà les grandes surfaces depuis le début du mois, au cas où quelqu'un oublierait que Toussaint en Novembre, Noël en Décembre... Mais non, même pas.

Donc, telle la fève de cacao devenue arbrisseau sous le climat humide qui est le nôtre actuellement, l'idée germa. Et ce d'autant plus, qu'après un coup d'oeil ici même, il s'avèra que parmi ma faible production bloguesque de l'an passé deux billets fort appropriés s'y trouvaient déjà.

Le climat toujours aidant, l'arbrisseau se transforma en un jeune cacaoyer vigoureux car, oh merci, j'ai encore de la mémoire, moi !, il me semblait bien que ma bibliothèque renfermait quatre autres volumes, déjà lus, et en lien avec le sujet. Vérification faite, je peux donc vous annoncer mon challenge.

En un mot, ce sera, c'était,  c'est  CHOCOLAT.

Loin de moi l'idée de coller à l'actualité consumériste, c'est juste qu'hier, en posant la main sur un énième roman dans le titre duquel apparaissait ce mot sucré, je me demandais pourquoi je craquais plus facilement sur le chocolat au rayon librairie plutôt qu'au rayon confiserie (oui, je sais les psy se posent toujours de graves questions.. ).

Bon, tout ça pour dire que j'ai juste pris le problème à l'envers et que mon challenge jamais décidé, ni donc annoncé, est bouclé.
En voici donc les titres :

Chocolat   Joanne Harris (1)

Le Rocher de Montmartre   Joanne Harris (2)
(d'accord y'a pas "Chocolat" dans le titre mais bon on va pas chipoter sur les mots)

Chocolat Amer   Laura Esquivel (3)

Soeurs Chocolat   Catherine Velle (4)

Le Chocolat d'Apolline   Michel Cyprien (5)

Et merci pour le Chocolat   Charlotte Armstrong (6)

Pour l'Amour du Chocolat   José Carlos Carmona (7)

Un Chocolat chez Hanselmann    Rosetta  Loy  (10)

 

 Comme je ne veux pas paraître trop flemmarde, j'accepte vos idées et je m'engage à lire les romans que vous me suggérerez.
Certaines lectures datant d'un bail, maintenant le vrai défi est de rédiger les billets manquants...

Ajout du 16/11 : tout un programme !

Amis Amants Chocolat   Alexander McCall Smith (8)

Ajout du 2/1/2011 : ça se corse...

L'affaire Chocolat   Haïm  Gouri (9)

 

Et pour le challenge "Café", c'est quand vous voulez !

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11 novembre 2010

TAGada tsoin tsoin !

Celui des 15 auteurs qui tourne actuellement sur les blogs et envoyé par La Ruelle Bleue

ENID  BLYTON

"Monsieur"  LAROUSSE ( ! )

JOSEPH  KESSEL

COLETTE

JEAN  GIONO

ERNEST  HEMINGWAY

JACK  KEROUAC

HERMAN  HESSE

SIGMUND  FREUD

ALBERT   CAMUS

ANNE  PHILIPE

DORIS  LESSING

PHILIPPE  DJIAN

SYLVIE  GERMAIN

CLAUDIE  GALLAY

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"Passage"  de Soizick Meister

A qui l'tour ?

10 novembre 2010

Je chante donc je suis

9782847201741Le début de ce livre c'est Perfect Life. Belle maison, grand jardin, une femme aux qualités multiples, un mari pilote de ligne qui ressemble à Paul Newman, quatre enfants irréprochables, même le chien s'appelle Beau... bref tout va pour le mieux pour Clothilde sous le soleil de la Bourgogne. Elle a même la chance d'avoir une amie qui lui procure un boulot alors que pointe l'angoisse des journées vides maintenant que les petits derniers sont aussi scolarisés, elle rafle une affaire immobilière au vu et au su de tout le monde, trouve des artisans disponibles en un rien de temps et lorsqu'elle a besoin d'une consultation chez un spécialiste, c'est dans la semaine qu'on lui en propose un. De quoi se plaint-elle, hein ?.. Oui mais voilà, suite à un terrible stress, Clothilde perd soudainement sa voix.

Tout ça commençait à me lasser et je regrettais déjà d'avoir cédé aveuglement à l'achat du nouveau livre d'Anne Delaflotte Mehdevi. J'avais tellement aimé "La relieuse du gué" et son ambiance intimiste que je n'imaginais pas un instant être déçue par ce second roman. Et je pensais comme la cousine bourguignonne "T'as bien des soucis de riches toi..."

Heureusement, alors que la mécanique familiale s'enraye pour mieux se recaler suite à cet événement, entrent en scène le chant et la musique. Et, contre toute attente, me voilà embarquée dans le parcours de cette femme à la recherche d'un désir profond d'exister.

A une analyse psychologique fouillée, l'auteur privilégie une approche de front. Point de grandes plongées dans le passé, l'auteur laissant, s'il le souhaite, le lecteur tirer lui-même les fils anciens qui ont pu se nouer au point de former cette grosse boule dans la gorge qui obstrue la parole et, au- delà, le désir. L'ici et maintenant sont sur le devant de la scène, avec en toile de fond une sensualité omniprésente.

"Cecilia Bartoli en était au titre 6, Caldo sangue de Scarlatti, Clothilde distinguait les paroles juste assez pour comprendre qu'il s'agissait de sang et d'adieux.

Chant : intonation particulière de même nature que la parole, à la différence que dans le chant, la voix s'élève.

Titre 9, Scarlatti, Qui resta... L'alta Roma.

Sur son radeau, Clothilde à la parole empêchée se préparait à explorer la voix en musique. Avant de se lancer, elle écoutait, dressée sur les accords du violon, cette Romaine qu'elle guettait et craignait comme un feu."

Au final, un texte sympathique, mais pas bouleversant, pour aborder l'histoire d'un tournant de vie et l'affirmation de soi.

Pour vos yeux, l'avis d'Aifelle ainsi que d'autres liens. Et pour vos oreilles et bercer votre lecture, le magnifique Caldo sangue.

 

Cecilia Bartoli, Scarlatti, "Caldo sangue"

 

 

Fugue     Anne  Delaflotte  Mehdevi     Editions  Gaïa

 

chanteurs010

7 novembre 2010

Un homme heureux !

9782253122630Imaginez-le, plongé dans un bain brûlant alors que la température extérieure n'excède pas les 4 ou 5° Celsius, la baignoire gonflable plantée dans le décor grandiose de la chaîne himalayenne, l'homme dégustant dans son bain une coupe de champagne, avec en fond sonore Norma qui crépite sur un vieux gramophone pendant qu'un tafelspitz mijote sur le feu...

Nous sommes dans les années vingt et cet homme se nomme Joseph Francis Rock. Tel que nous le surprenons là dans ce grand moment d'intimité, il est en train de rêver à sa prochaine destination, le pays Golok, terre encore inexplorée. Et pour cause... menées par une reine les tribus nomades qui y règnent sont d'une extrême sauvagerie. Depuis qu'un vieil espion britannique, rencontré une veille de nouvel an dans un pub de la frontière birmane, a confié à Rock l'existence de ce royaume des femmes, "ultime vestige du peuple des Amazones...", c'est devenu une obsession. Il doit y aller, il va y aller, il y va...

Rock n'en est pas à sa première expédition. Il a fui son Autriche natale à sa majorité, bourlingué en Europe et en Amérique, s'est improvisé professeur et botaniste, a enseigné à l'université d'Honolulu où il s'est vu confié une première mission exploratrice en Amérique du Sud. De fil en aiguille, d'autres portes lui sont ouvertes et pas les moins prestigieuses, Harvard, National Geographic. Séduction et filouterie lui permettent toujours d'arriver à ses fins.
Cette fois-ci encore, sous couvert de faune et flore inconnues et d'une montagne sans doute plus haute que l'Everest, Rock va trouver les moyens de faire financer sa quête de la terre promise.

" Au fond des jumelles, l'hiver dessine les ombres à la paresseuse, au plus pâle, en contours frêles. L'or, lui, depuis les faîtières des temples, ruisselle toujours en longues coulées huileuses. Claquements d'oriflammes, pluie de couleurs d'enfance, vert prairie, bleu éther, jaune pissenlit. Et ce rouge tellement franc du collier !
En contrebas de la ville, dans la ceinture ocreuse de la muraille, continue de se nicher toute la vieillesse du monde - grêle de flèches, ombres de chevaux cabrés, fantômes d'archets. Choni n'a pas changé. La profondeur des siècles, comme avant. Et, en même temps, la fraîche évidence de l'instant.
La neige, ici, n'est tombée que sur les sommets. Ce soir, sur la terrasse à la pivoine, quand le bras se tendra pour tâter l'air de soie noire, on croira encore frôler la robe des étoiles."

Nous peinons avec ce cher Rock dans le froid et les tempêtes de neige, traversons les contrées sauvages aux confins du Tibet et de la Chine, nous reposons le temps d'un hiver dans le palais du prince de Choni, attendons la fin des intempéries dans les monastères, croisons chamanes, missionnaires pentecôtistes, colporteurs, brigands, voyageurs, dont la célèbre Alexandra David-Neel, évitons les Seigneurs de la guerre et les troupes de Tchang Kaï-chek. Comme les populations rencontrées, nous rigolons devant les extravagances de Rock et, avec lui, ne tendons plus qu'à une seule chose, la rencontre avec la célèbre Reine des Goloks.

"Plus on avança, plus les femmes se firent charpentées et puissantes, plus on leur devina des jambes bien plantées sous leurs houppelandes de laine brute, et de solides croupes de cavalières. Vers la caravane elles levaient de longues faces d'antilopes où ne se lisait pas la peur (...) C'étaient maintenant les cheveux des filles nomades, de plus en plus épais; leurs cascades de nattes, elles-mêmes de plus en plus alourdies de perles de corail, turquoises, boules d'ambre, billes d'argent, parfois."

Rock atteindra-t-il enfin le pays des Goloks ? Ne comptez pas sur moi pour vous le dire, mais ce qui est sûr c'est qu'il découvrira quelque chose qu'il n'était pas venu chercher...

Bref, si vous tentez l'aventure, vous l'aurez compris, un roman haut en couleur vous attend.

Mais ce cher Rock n'est pas seulement un personnage de roman. Il a réellement existé et l'auteur prend soin dans sa préface d'informer le lecteur qu'elle n'a rien inventé. Précision nécessaire tant la personnalité et la vie de J.F Rock sont incroyables. La preuve ICI

L'auteur mêle habilement les éléments autobiographiques à la réalité de l'expédition. Elle brosse le portrait d'un personnage truculent, obsessionnel à souhait, navigant sans cesse entre enthousiasme et abattement, féru de langues, de photographie, de botanique et d'ethnologie et qui, jusqu'à la fin de ses jours, restera un éternel bourlingueur.

Première rencontre avec Irène Frain. Un vrai talent de conteuse et une formidable idée que cette biographie romancée qui rend un bel hommage à cet homme à la vie exceptionnelle et témoigne d'un temps révolu, celui des grands explorateurs (sans GPS ni portable ni balise argos mais avec baignoire et gramophone !).

 

Au Royaume des Femmes     Irène Frain     Editions Le Livre de Poche

 

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