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Le Souk de Moustafette
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31 juillet 2018

Juillet, c'est plié !

music_instr_020Déjà la fin d'un mois d'été où le Souk a tourné au ralenti sous le soleil. Je travaille et lorsque je suis en repos je fais quelques escapades dans ma nouvelle maison encore en chantier et sans internet, beaucoup de kilomètres aussi et le soir, je pique rapidement du nez sur mon bouquin... Mais je tiens particulièrement à remercier Madame lit qui, grâce à son Défi littéraire, m'a permis de découvrir un nouvel auteur colombien pour lequel j'ai eu un véritable coup de coeur. J'ai deux autres de ses romans sous le coude et j'attends avec impatience la sortie poche de "Le corps des ruines", paru l'an dernier. Juan Gabriel Vasquez sera je crois, pour moi, la découverte de l'année.

Pour conclure ce voyage dans une Colombie qui peine à retrouver la sérénité, j'ai trouvé ce petit morceau léger et entêtant, interprété par ces artistes de la jeune scène colombienne. J'avoue craquer pour le côté chabadabada sirupeux de cette mélodie aux allures de tube de l'été. En duo ici Juan Pablo Vega  etCatalina García.

 

En route pour la prochaine étape, l'Allemagne est au programme, une autre musique...

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23 juillet 2018

Colombinades

9782757836057Il y a de ça des lustres, mon premier véritable coup de coeur littéraire, fut je crois "Cent ans de solitude". J'ai hésité à le relire pour le mois consacré à la Colombie, peur de ne pas retrouver l'engouement  qui m'avait transportée à l'époque. Aussi ai-je jeté mon dévolu sur un auteur dont j'avais entendu beaucoup de bien à la sortie du présent ouvrage.

En 1996, Antonio Yammara, jeune avocat et professeur d'université, se lie d'amitié autour d'une table de billard avec un certain Laverde, homme mystérieux et taiseux dont on dit qu'il sort de prison. Un soir, ce dernier est assassiné en pleine rue sous les yeux du narrateur qui, lui-même blessé, va tenter quelques années après d'en savoir plus sur ce Laverde tout en gérant ses propres angoisses post-traumatiques. Aidé par la fille de Laverde, il remontera peu à peu l'histoire de cet homme dont la mort s'enracine quelques décennies plus tôt quand Pablo Escobar régnait en parallèle sur une Colombie qu'il mit bientôt à feu et à sang. La mort de Laverde risque bien de changer la vie d'Antonio qui vient de devenir père.

" Le bouleversement d'un passé qu'on pensait immuable est sans doute ce qu'il y a de plus difficile et de moins acceptable."

Que voilà un roman intelligent comme je les aime, mêlant petite et grande histoire. Cette plongée dans les années 70-80 est abordée sous un angle intéressant, loin des épopées sanglantes des cartels de la drogue, celui du quotidien d'un homme, Laverde, qui se retrouve à réaliser un rêve, à fonder une famille et à devoir choisir comment faire perdurer le tout. Il y est question d'amour, de transmission, de choix de vie, de disparitions et de mort (je vous laisse découvrir à quoi se réfère le titre), le tout sur un fond historique passionnant dont mes seules connaissances se résumaient aux bulletins d'informations de l'époque concernant la guerre des narcotrafiquants. J'ai énormément apprécié le talent de l'auteur à conjuguer la banalité des hommes et la tragédie de son pays pour laisser en héritage, à ceux qui n'ont pas connu cette époque, le soin de transformer ce fardeau morbide et crapuleux en élan de vie. Une bien belle et émouvante histoire, avec en prime, une balade parfumée et colorée entre Bogotá la montagneuse et la moiteur de la vallée du Magdalena.

"En lisant dans le hamac, j'éprouvais plusieurs sensations, certaines indéfinissables, mais j'étais surtout troublé de découvrir que cette histoire qui ne mentionnait pas mon nom parlait de moi à chaque ligne. Les émotions qui me gagnaient ont fini par se réduire à un terrible sentiment de solitude dont l'absence de motif apparent induisait qu'il était sans remède. La solitude d'un enfant."

Le bruit des choses qui tombent    Juan Gabriel Vásquez  (traduit de l'espagnol par I. Gugnon) Editions Points

510Rp65PQ-LCharmée par le talent de Juan Gabriel Vásquez, j'enchaîne sur un second roman qui, cette fois, nous entraîne dans la Colombie du XIXe siècle. Miguel Altamirano, un personnage idéaliste et fantasque pris dans les remous des guerres civiles qui s'enchaînent en Colombie depuis l'Indépendance espagnole, décide de s'installer au Panamá, alors province colombienne, dans la ville de Colón où il fera la connaissance de son fils José, le narrateur parti à sa recherche. Le choix d'Altamirano n'est pas fortuit. C'est qu'à cette même époque, le début des années 1880, les travaux du canal de Panama sont en plein essor sous l'égide du célèbre Ferdinand de Lesseps. Fasciné par ce Français et son projet grandiose, Miguel se fait par voie de presse le porte-parole du Progrès et des avancées du chantier, toujours positives, destinées à rassurer les actionnaires. Il n'hésite pas à falsifier la réalité jusqu'au scandale qui vit s'arrêter les travaux en 1889 et Miguel courir à sa perte. La communauté française est très présente et c'est en son sein que José rencontrera son épouse, Charlotte. La débandade française qui succéda au scandale, les catastrophes naturelles, les maladies, laissent la ville de Colón exsangue et peu à peu désertée. Seul, José persiste à y vivre alors que se déclenche en 1899 1a guerre des Mille Jours qui voit s'affronter une fois de plus les libéraux et les conservateurs. Elle prendra fin en 1902. L'année suivante, l'Indépendance du Panamá sera acquise à coup de dollars par les Etats-Unis qui lorgnent sur le canal qu'ils achèveront en 1914.

"Ainsi passait le temps, comme on le dit dans les romans, et la vie politique faisait des siennes à Bogotá. Le président poète auteur de l'hymne glorieux avait juste eu à tendre le doigt pour désigner son successeur : don Miguel Antonio Caro, illustre spécimen de l'Athènes sud-américaine qui faisait d'une main des traductions homériques et de l'autre des lois draconiennes. L'occupation favorite de Miguel Antonio consistait à ouvrir les classiques grecs et à fermer les quotidiens libéraux. Et aussi à exiler tous azimuts."

Voici donc l'histoire que nous livre José Altamirano. S'il tient à le faire, c'est surtout pour rétablir une vérité et révéler la trahison dont il s'estime victime de la part du célèbre romancier Joseph Conrad, trahison qui porte le nom de Nostromo, roman paru en 1904. Conrad y raconte l'histoire du Costaguana, un état imaginaire caribéen, qui lui a été inspirée par le récit d'un exilé colombien...

"Aujourd'hui, 7 août 1924, alors que dans ma lointaine Colombie on célèbre les cent cinq ans de la bataille de Boyacá, l'Angleterre pleure cérémonieusement et en grande pompe la disparition du Grand Romancier. Alors qu'en Colombie on commémore la victoire des armées indépendantistes sur les forces de l'Empire espagnol, ici, sur le sol d'un autre empire, on vient d'enterrer l'homme qui m'a volé..."

Tout au long de Histoire secrète du Costaguana plane l'ombre de Conrad, dont l'auteur nous distille des éléments biographiques répondant comme en miroir à ceux de José Altamirano. D'hypothétiques correspondances qui liaient inexorablement les destins des deux hommes jusqu'au dénouement final. Une jolie trouvaille littéraire de la part de l'auteur qui non seulement rend hommage au célèbre écrivain voyageur, mais se réapproprie son histoire et venge ainsi son héros, José Altamirano !

Mêmes éloges de ma part que pour le précédent titre présenté. Un auteur qui tourne résolument le dos au réalisme magique sud-américain pour plonger sous les oripeaux d'une réalité historique où se dissimulent à la fois la force et la fragilité des personnages, de la Colombie et de son peuple. J'en redemande !

Histoire secrète du Costaguana     Juan Gabriel Vásques     (traduit de l'espagnol par I. Gugnon) Editions Points

Lus dans le cadre du Défi littéraire de Madame lit.

 

logo-madamealu

 

18 juillet 2018

Chlorophylle

Arbres-remarquables-du-Finistere_3913C'est à une promenade pleine de chlorophylle que nous convie cet album merveilleusement illustré de photographies actuelles ou d'époque, car nous partons à la rencontre de géants parfois multicentenaires. Un itinéraire de balades en forme de jeu de piste à travers le Finistère pour découvrir les plus beaux arbres qui, contre vents et marées et aussi contre bêtise humaine, résistent vaille que vaille.

Pas facile de résumer ce livre qui donne autant à voir qu'à lire. On y apprend qu'un des patriarches des arbres européens est un châtaignier de plus de 1200 ans  qui se trouve en pays bigouden à Pont l'Abbé. 20 mètres de circonférence en 1932, avant qu'un idiot de chasseur  n'y mette le feu en enfumant des terriers à sa base, cet arbre a bien failli mourir. Mais la résilience se rencontre aussi chez nos amis les arbres, et à ce jour il poursuit sa vie grâce à des rejets qui, s'ils limitent désormais sa circonférence à 14 mètres, n'en font pas moins un survivant remarquable. A Roscoff, un figuier de 1610, palissé sur 600 m² (vieille carte postale impressionnante), a été abattu en 1987 pour permettre la construction d'une résidence...

Du pays de Brest en passant par la Cornouaille, les monts d'Arrée et le pays de Morlaix, voici donc un complet inventaire de notre patrimoine arboré. Plus de 200 "Arbres remarquables" (labels hélas qui ne les protègent pas toujours) et 80 portraits magnifiques agrémentés d'histoires, de légendes et d'émotions. Une bonne idée de balades à venir afin de partir à la découverte de ces trésors, le livre à la main. Si certains sont visibles gratuitement, d'autres se trouvent dans des lieux privés. Les célèbres enclos paroissiaux en abritent beaucoup, ainsi que les forêts de Huelgoat et du Cranou, mais on peut les croiser aussi au centre des villages ou au détour d'un petit chemin de campagne. Et quel plaisir d'en reconnaître certains ou de découvrir ceux de son village dans cet ouvrage ! Je suis toujours contente de passer chaque jour devant "mes" deux chênes pédonculés et de traverser la forêt de Huelgoat au gré des saisons, j'avoue que cela va me manquer lorsque je quitterai d'ici quelques temps ce paradis vert pour un autre, plus maritime.

Dernièrement, les livres consacrés aux arbres ont le vent en poupe, et c'est tant mieux. S'ils pouvaient parler, ils en auraient des choses à nous raconter ! Et moi je remercie Hélène des éditions Locus Solus pour cet envoi ainsi que Babelio pour ce partenariat. Un joli partage.

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Les textes sont de Mickaël Jézégou et les photographies de G. Bernard, M; Jézégou et Y. Morhan, bravo à eux. Pour en savoir plus et découvrir si un livre identique recense les arbres de votre région, un blog à visiter Les têtards arboricoles.

Quelques mots de Pierre-Jakez Hélias pour terminer "Le tronc d'un arbre est une grosse corde, il y a même des noeuds dedans. Mais à chaque bout, les fils de la corde se desserrent et s'élargissent pour s'accrocher au ciel et à la terre. On les appelle des branches, en haut, et des racines, en bas. Mais c'est la même chose. Les racines cherchent leur chemin dans le sol de la même manière que les branches cherchent leur chemin dans le ciel."

Arbres remarquables du Finistère       Editions Locus Solus

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Dans mon village, les deux Médicis plantés en 1589 à la mort de Catherine.

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Mon arbre remarquable à moi ! Une graine de frêne que j'ai rapportée par inadvertance lors de mon déménagement de Charente-Maritime, il y a sept ans. Depuis, en mode bonzaï bien que je ne le taille pas, il grandit lentement mais sûrement dans une petite auge de pierre. Je pense le mettre en pleine terre à l'automne lors de mon prochain déménagement en espérant qu'il apprécie la transition.

7 juillet 2018

La petite dame de Saint-Lunaire

51jKJYK95GLRetrouvailles avec l'auteure que je n'avais pas lue depuis Julius aux alouettes.

Jeanne Devidal est morte centenaire et a eu une vie bien remplie. Née à Brest en 1908, elle y vécut jusqu'à ce que les bombardements de la Seconde Guerre mondiale l'y en chassent et qu'elle s'installe avec sa mère à Saint-Lunaire, à l'ouest de Dinard.  En disponibilité des P.T.T afin de s'occuper de cette dernière, elles tiennent un commerce de bimbeloteries et souvenirs. Est-ce à la mort de sa mère en 1954 que la solitude pousse Jeanne à se replier sur elle-même et à s'enfoncer doucement dans une forme de paranoïa qui l'incite à se protéger toujours davantage de l'extérieur ? C'est fort possible, sans compter qu'elle atteint l'âge où se développe cette pathologie. Toujours est-il que Jeanne commence à ériger une forteresse entre elle et le monde, truelle à la main, elle élève, consolide, renforce, isole, ce qui n'est au départ qu'un simple pavillon. Allant jusqu'à construire un mirador, qui causera d'ailleurs sa perte, elle scelle dans les murs des trophées aussi divers que variés ramassés sur la grève. Si elle se fiche du plan d'occupation des sols, sa maison empiétant sur le trottoir, elle n'en est pas moins respectueuse de la nature, se refusant à abattre le tilleul du jardin qui se retrouve au milieu du salon... Protégée par quelques personnalités haut-placées, les plaintes du voisinage resteront lettres mortes.

"Dès qu'il a vu la maison, l'homme en a compris la nature, il en a su l'usage. Des murs pare-feu contre la barbarie des hommes, contre leur incurie, leur puissance destructrice. Des murs écrans, blindés. Une armure pour faire barrage à leur démesure."

Côté barbarie, Jeanne a eu sa dose. Déjà hantée par les images des bombardements brestois, elle connaîtra la torture par électrochocs lorsqu'elle tombera aux mains de la Gestapo pour faits de résistance, d'où sans doute son délire autour des ondes qui lui vaudra plus tard un séjour à l'HP. Elle déplorera aussi la disparition de ses frères pendant la guerre. Seule survivante de sa fratrie, elle préfèrera la compagnie des morts, "ses Invisibles", à celle des vivants. Et la nature lui apportera bien plus de satisfactions que la fréquentation des humains.

"Aujourd'hui, la femme laisse son jardin en jachère. Et il en va de même pour sa mémoire. La nature invasive y fera son oeuvre. Elle l'emmaillotera dans un cocon d'herbes folles cousu de liserons blancs. Linceul parfumé. Elle, matière évidée, consentante, mêlée aux essences des arbres. Le front oint d'une pincée de pollen pour unique bénédiction."

J'ai retrouvé avec délectation l'écriture poétique de Fabienne Juhel, mise au service d'un double portrait émouvant, celui d'une femme tour à tour forte, cheminant vaille que vaille, mais tout aussi fragile funambule oscillant sur la corde raide tendue entre deux mondes, le réel et l'imaginaire. Je suis toujours subjuguée par la richesse des entrelacs que tissent les personnes délirantes, tricotant de petits arrangements entre leurs traumas et notre réalité afin de s'adapter et de se protéger "d'un monde qui chavire".   L'auteure s'y entend à mêler les deux univers . Et comment rester insensible à cette femme donnant droit de préemption à la nature, capable de rester assise sous son tilleul, guettant pendant des heures la chute de la dernière feuille avant de les ramasser toutes ? Jeanne Devidal est morte jour pour jour il y a dix ans, sa maison n'existe plus, le tilleul non plus.

C'est certain, ces deux-là étaient faites pour se rencontrer...Un grand merci à Fabienne Juhel de nous avoir permis de faire sa connaissance en lui rendant un si tendre hommage.

La femme murée     Fabienne Juhel     Editions du Rouergue

"Mirador. Pour regarder dehors. Regarder l'or du temps se coucher dans les draps ourlés d'écume."

Un court aperçu de "l'oeuvre" de Jeanne Devidal

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