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Le Souk de Moustafette
Le Souk de Moustafette
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25 juillet 2011

En bas, les nuages*

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Le soleil préfère paresser sous sa couette de nuages
Il a enfin daigné pointer le bout de son nez hier soir
fort tard il est vrai !
Je me suis plu à imaginer que c'était la mer et des îles
qui s'étendaient sous mes fenêtres
(cliquer pour agrandir)

*titre librement inspiré du recueil de nouvelles du même nom de Marc Dugain


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20 juillet 2011

La yourte aux myrtilles

myrtillesEt si, dans la kyrielle de flics alcooliques, caractériels, frustes, taciturnes, réfractaires à toute hiérarchie etc etc...  on ajoutait l'inspecteur Yesügei exerçant ses talents d'enquêteurs dans la ville d'Oulan Bator ? 

"Mêm s'il portait le prénom de Yesügei le Preux, chef du clan des Torrents et père de Gengis Khan, ce Yesügei-ci n'était pas de leur lignage. Il n'avait pas été bercé, comme ses illustres ancêtres, dans des langes de zibeline (...). Yesügei ne faisait peut-être même pas partie de ces hommes -un sur cinq en pays mongol selon les statistiques- porteurs des gênes royaux."

Confronté au meutre d'un ressortissant américain venu claquer ses dollars lors d'un séjour de chasse organisé dans l'immensité des steppes mongoles, Yesügei va faire preuve de tout son talent pour régler cette affaire à sa manière. Lui-même chasseur émérite, animiste et fin connaisseur de son peuple et de ses coutumes, c'est sur son antique moto Guzzi qu'il va sillonner la steppe et démêler l'écheveau de présomptions qui voudrait bien désigner comme coupable l'un des siens.

C'est sans compter sur les richesses naturelles de la Mongolie et de son sous-sol qui intéressent déjà fortement les Russes et les Chinois. Alors, ces chasseurs américains sont-ils vraiment ce qu'ils prétendent être, de simples touristes fortunés ? Yesügei mettra un point d'honneur à le découvrir afin de défendre la terre sacrée de ses ancêtres et leurs traditions.

Outre le personnage pittoresque de Yesügei qui vaut le détour, ce roman policier est avant tout prétexte à un dépaysement et une approche originale de la culture mongole. On y apprend beaucoup sur ce peuple qui, bien que de plus en plus sédentarisé, n'en continue pas moins à vivre chichement sous les yourtes, même aux abords des grandes villes. Truffé de détails sur la vie quotidienne, règles de vie sous la yourte, cuisine, alcool, ce livre témoigne surtout de l'attachement des Mongols à la nature et aux pratiques religieuses animistes. Il se veut également un réquisitoire contre les puissances dominantes qui, à coup de concessions, achètent la terre pour en extraire ce qu'elle a de meilleur au détriment des autochtones contraints d'y trimer. Témoignage aussi de la difficulté d''un peuple pris dans la dualité des traditions et de la modernité occidentalisée.

"Dès qu'ils eurent atteint Zuunmod, petite bourgade à une cinquantaine de kilomètres d'Oulan Bator, ils prirent la direction du monastère de Manzshir. Au moment de changer de route, ils furent dépassés par un 4 x 4 flambant neuf, conduit de manière sportive par un bonze à la tonsure impeccable, au teint parfait et au sourire publicitaire.
  - Lama mondain, lança Yesügei sans rire. Prends par-là, doucement, je te dis. Ralentis, nom d'un chien !
 Même s'il n'avait ni l'âge ni l'expérience de Yesügei, Gerel savait qu'il existait des bonzes de toutes catégories. Mondains, nomades, reclus. Des lamas des villes et des lamas des champs. Des hommes d'affaires et des hommes de prières. Des saints et des imposteurs. Une catégorie sociale qui n'avait pas laissé que des bons souvenirs à ceux qu'ils asservissaient du temps de la théocratie et des moeurs féodales."

Un voyage littéraire bien documenté, une lecture plaisante, non dépourvue d'humour, bref un livre agréable et divertissant  mais dont on regrette qu'il ait été écrit par une française et non par un auteur mongol. Grande connaisseuse de la région, je ne remets donc pas en doute la véracité des jurons et expressions imagés dont elle parsème son roman, tels "Poux mal cuits" ou "Fausses couches ambulantes" !

Des myrtilles sous la yourte      Sarah Dars      Editions  Picquier poche    

 

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17 juillet 2011

Dimanche pluvieux

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Crapaud heureux !
Il va pouvoir se pavaner tranquillement entre persil et estragon
le chat n'est pas dispo pour une partie de cache-cache sous la pluie... 

15 juillet 2011

Enardite aiguë

41PxCOze7aLCitant, dans le livre précédemment chroniqué, "les vers d'Essenine, le pendu de Pétersbourg, j'irais bien sur le Bosphore, là dans tes yeux j'ai vu la mer, un magnifique incendie bleu.", l'auteur faisait un clin d'oeil à son dernier roman. Comme lui, j'ai aussi fait le voyage.

Au regard des nombreuses critiques, je serai brève. J'ai beaucoup lu que ce court roman manquait de souffle, sans doute aurait-il pu bénéficier d'un étoffage conséquent digne de l'oeuvre colossale du personnage principal. Mais peu m'importe, cette parenthèse ottomane dans la vie de Michel-Ange, récemment découverte et agréablement romancée, m'a procuré un plaisir de lecture tout chamarré de couleurs et de parfums de mille et une nuits.

J'ai aimé la compagnie de cet homme mal dégrossi, imbu de lui-même comme pour mieux camouffler ses faiblesses, qui erre au milieu de la ville et des ses hôtes, écrasé par la nécessité de surplanter le plus doué de ses pairs, Léonardo da Vinci, et celle d'accoucher d'une oeuvre d'art dans une ville qui en recelle déjà quantité.
Les personnages que Michel-Ange rencontrera ébranleront ses certitudes, ses propres sentiments comme son identité et ses idées à l'égard des Infidèles.

"La nuit ne communique pas avec le jour. Elle y brûle. On la porte au bûcher à l'aube. Et avec elle ses gens, les buveurs, les poètes, les amants. Nous sommes un peuple de relégués, de condamnés à mort."

C'est également une jolie réflexion sur la création et la beauté chatoyante de l'art musulman. La Renaissance n'a qu'à bien se tenir, et les lycéens ne s'y sont pas trompés, une fois de plus !
Sans conteste le livre le plus solaire de l'auteur.

Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants      Mathias Enard      Editions Acte Sud

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 Je profite de cette crise d'Enardite pour vous parler aussi du premier roman de l'auteur lu l'an dernier.

Dans un pays où règne la guerre civile, ce pourrait être le Liban, un homme vit rivé à la lunette de son fusil. Lui et son arme ne font plus qu'un, comme une extension de lui-même avec laquelle dorénavant il vit, dort. Elevant le tir au rang d'un art, art du vivre et du mourir, l'homme tire peu mais bien, privilégiant la difficulté afin d'en augmenter le plaisir tout en engageant un curieux dialogue entre lui et ses futures victimes.

"Le tir est avant tout une discipline. Il faut se retenir, se comprimer, se refermer, se concentrer dans la cible jusqu'à disparaître soi-même dans la lunette pour ensuite se libérer, s'ouvrir et se laisser couler comme une goutte d'eau. Il faut fabriquer une relation entre soi et les choses, un lien direct qu'on appelle trajectoire ; il faut l'imaginer, la suivre comme un chemin. Il faut s'abstraire du monde, se retirer petit à petit dans le recoin irréel de la mire jusqu'à se perdre dans les reflets infinis des lentilles."

Orgueilleux et sûr de lui, son équilibre vacille lorsqu'il rencontre Myrna, une jeune fille de quinze ans qu'il engage pour veiller sur sa mère avec laquelle il vit et que la guerre a rendu folle. Myrna va pourtant se révéler plus rusée que le combattant et s'insérer entre lui et la lunette de son fusil . Au fil de leur cohabitation, elle devient pour cet homme, qui ne sait s'exprimer que par le tir et la violence, source de fascination puis objet d'obssession quand elle profite d'une de ses absences pour disparaître. Quand il la retrouvera, pourra-t-il lui exprimer son attachement ?

Mathias Enard inaugure sa carrière d'écrivain avec un texte dur et âpre. Réussissant à se glisser dans l'esprit tour à tour exalté, hyper-maîtrisé ou vacillant et déprimé, d'un jeune que la guerre a trop vite déclaré être un homme, l'auteur joue déjà (texte paru en 2003), et avec brio, la cynique partition de l'amour et de la mort. Il sait, malgré le contexte, rendre son personnage attachant, fragile héros camouflé dans son treillis, bravant ou refoulant sa peur, hésitant entre une attraction morbide et un dégoût pour les situations cauchemardesques auxquelles la guerre le confronte, ne sachant caresser les corps que de la pointe de son arme, se révélant totalement démuni face à l'amour qui le submerge et incapable d'appliquer aux vivants sa belle discipline guerrière citée plus haut. Tout abandon serait-il signe de faiblesse ?

Pour un premier roman Mathias Enard n'a pas raté sa cible. Et si le terreau de la guerre n'est pas propice à l'éclosion des beaux sentiments il permait celle d'un auteur en devenir à l'écriture maîtrisée. L'avenir le confirme.

La perfection du tir      Mathias Enard     Editions Actes Sud  Babel 

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10 juillet 2011

La nostalgie camarade...

arton133-af30fQuoi de mieux qu'un long voyage en train pour voir défiler le film de sa jeunesse sur l'écran des paysages qui s'étendent entre Moscou et Novossibirsk  où Mathias accompagne le corps de son ami Vladimir afin de l'enterrer dans sa vie natale.

Un long tête à tête pour Mathias qui revient sur son amour pour Jeanne. Jeanne, rencontrée à Paris à dix-huit ans et qui l'a quitté pour faire un doctorat à Moscou. Jeanne qui lui a présenté Vladimir. Jeanne qui l'appelle à nouveau quand Vladimir s'en est allé.

Emouvante réminiscence d'un temps révolu émaillé d'agapes alcoolisées, de périples au cours desquels Vladimir, tel un prince déchu, a transmis l'amour de sa terre aux deux français, entre balades historiques et pauses littéraires qu'inévitablement génère ce pays. Car Mathias se rêvait écrivain "(...) et de retrouver une liberté qu'en réalité je n'avais jamais connue, à part dans les livres, dans les livres qui sont bien plus dangeureux pour un adolescent que les armes, puisqu'ils avaient creusé en moi des désirs impossibles à combler, Kerouac, Cendrars ou Conrad me donnaient envie d'un infini départ, d'amitiés à la vie à la mort au fil de la route et de substances interdites pour y amener, pour partager ces instants extraordinaires sur le chemin, pour brûler dans le monde, nous n'avions plus de révolution, il nous restait l'illusion du voyage, de l'écriture et de la drogue."

C'est encore un livre, En Russie d'Olivier Rolin, qui poussera Mathias à rejoindre Jeanne à Moscou où il restera un an en sa compagnie et celle de Vladimir, s'embarquant dans une amitié trouble et fascinante, une sorte de Jules et Jim aux saveurs d'opium, d'héroïne et de vodka où chacun va se perdre dans l'illusion et la passion inaboutie.

Est-ce pour rattraper le temps perdu ou pour épuiser celui qu'il lui reste que Mathias entreprend ce dernier voyage ? Toujours est-il qu'il s'impose là l'épreuve du manque, de la perte et de la solitude, seul face au miroir des grandes étendues qui lui renvoie l'image de sa finitude.

" Nous rêvions d'une tout autre mort, nous qui n'avons connu ni la révolution, ni la guerre, nous rêvions d'un sacrifice, d'une noblesse, d'un courage et peut-être as-tu eu cette noblesse et ce courage, comme Tarass Boulba qui s'enquiert en mourant du sort de ses cosaques, tu as eu une pensée pour moi, pour Jeanne, pour le monde, pour l'infini tournoiement du monde, pour l'oubli qui ronge tous les noms et toutes les pages, et tu es parti vers le néant." 

Voilà bien longtemps qu'un livre ne m'avait bouleversée à ce point. J'avoue qu'il porte bien son titre et que l'auteur sait rendre à merveille la difficulté à faire le deuil des engouements adolescents, des illusions inaccessibles qu'il faut abandonner. Certains ne s'en remettent pas, préfèrent perdurer dans le paradis artificiel qu'est la jeunesse tant le quitter est douloureux et choisissent un ailleurs toxique mais consolateur pour panser leurs blessures. Certains, même, préfèrent ne jamais devenir vieux.

"On ne berce pas les enfants grandis." Alors on grimpe dans un wagon qui roule vers une fin du monde et on se laisse bercer bien malgré soi par le staccato du train et des souvenirs mêlés, pensant sans doute que le froid sibérien, à défaut de les anesthésier, les figera à jamais dans la grandeur de leur jeunesse.

Un texte magnifique qui a laissé SYLIRE plutôt déprimée.

L'alcool et la nostalgie      Mathias Enard      Editions Inculte

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