DEPLACEMENTS qui ne vaut pas le détour
Une couverture qui m'évoque l'enfance, quand on s'ennuie en voiture et que l'on s'amuse à regarder défiler dans le rétroviseur la vie que l'on laisse derrière soi. Stop. Marche arrière. On rembobine le film. Mais, illusion ! Déception ! Et on comprend que ce qui est passé le reste à jamais. La 4ème de couv confirmait qu'il s'agissait bien d'un retour en arrière : " une jeune femme revient dans son ancienne maison prendre des photos. Dans le jardin, il y a six ans, elle a surpris une scène impossible qui reste une énigme pour elle. La narratrice a vu, mais elle ne sait pas ce qu'elle a vu. Alors elle cherche.. Que du bonheur ! se dit Moustafette déjà prête à farfouiller dans la mémoire de l'auteur, à la recherche d'un quelconque traumatisme qui viendrait alimenter les références de son mémoire...
D'emblée, la description de la scène impossible; puis, des phrases courtes, sujet, verbe, complément; des paragraphes qui s'enchaînent sans lien apparent; on passe de Toulouse à l'Ethiopie, de Paris à Angkor, de l'Antiquité à nos jours, du présent au passé. Oui, je sais, ça s'appelle "déplacements" ! Ce fouillis reflète bien la quête de l'auteur, les méandres que parcourt sa pensée. Mais STOP ! je n'arrive plus à suivre. Récit désaffecté, aucune émotion ne transpire, ne m'atteint. Discours décousu, procédant sans doute par associations , réminiscence obsédante de la fameuse scène. Très vite, tout comme moi, l'auteur constate: " J'ai pensé que c'était un tort de vouloir à tout prix faire une histoire totale des morceaux amassés ".
Donc déception, d'un point de vue romanesque. Mais réussite, si l'on se place derrière le divan ! Ce texte rend compte du cheminement laborieux de la pensée en quête de sens et de la force des résistances. Et la froideur émotionnelle ? Peut-être pour ne pas sombrer, seule défense face au vide et à l'incompréhension, ou au contraire, dernier voile qui dissimule l'inadmissible.
Autres textes de Marie Cosnay, Que s'est-il passé (2003), La scène perdue (2005), Villa Chagrin (2006). Une lente élaboration, je vous dis ! Et encore de nombreuses séances à venir...
Déplacements Marie Cosnay Editions Laurence Teper